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Est-ce ainsi que les hommes vivent ?

Léo Ferré
Language: French


Léo Ferré

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ferrel
[1961]
Poème de Louis Aragon
Poesia di Louis Aragon
Musique de Léo Ferré
Musica di Léo Ferré

luiarag

La rencontre de Léo Ferré (musicien, poète, chanteur, anarchiste) et de Louis Aragon (poète, écrivain, communiste) a donné de très sublimes chansons, dont celle-ci qui s'inscrit sans l'ombre d'une nuance dans les Canzoni contro la Guerra. - Marco Valdo M.I.
Tout est affaire de décor
Changer de lit changer de corps
A quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m'éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j'ai cru trouver un pays.

Cœur léger cœur changeant cœur lourd
Le temps de rêver est bien court
Que faut-il faire de mes jours
Que faut-il faire de mes nuits
Je n'avais amour ni demeure
Nulle part où je vive ou meure
Je passais comme la rumeur
Je m'endormais comme le bruit.

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.

C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien

Dans le quartier Hohenzollern
Entre la Sarre et les casernes
Comme les fleurs de la luzerne
Fleurissaient les seins de Lola
Elle avait un cœur d'hirondelle
Sur le canapé du bordel
Je venais m'allonger près d'elle
Dans les hoquets du pianola.

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.

Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke.

Elle était brune elle était blanche
Ses cheveux tombaient sur ses hanches
Et la semaine et le dimanche
Elle ouvrait à tous ses bras nus
Elle avait des yeux de faïence
Elle travaillait avec vaillance
Pour un artilleur de Mayence
Qui n'en est jamais revenu.

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.

Il est d'autres soldats en ville
Et la nuit montent les civils
Remets du rimmel à tes cils
Lola qui t'en iras bientôt
Encore un verre de liqueur
Ce fut en avril à cinq heures
Au petit jour que dans ton cœur
Un dragon plongea son couteau

Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent.

Contributed by Marco Valdo M.I. - 2008/10/14 - 09:32




Language: Italian

Versione italiana di Lele Felice
È COSI' CHE GLI UOMINI VIVONO

È tutto un problema di apparenza
Cambiare letto, cambiare corpi
A che scopo se sono ancora io
Che tradisco me stesso
Io che mi trascino e mi dissipo
E il mio nome si spoglia
Nelle braccia simili di ragazze
Dove ho creduto di trovare un paese.

Cuore leggero cuore mutevole cuore pesante
Il tempo di sognare è corto
Che cosa fare dei miei giorni
Che cosa fare delle mie notti
Io non avevo amore né dimora
Nessuna parte dove vivo o muoio
Passavo come il brusio
Mi addormentavo come il rumore

È così che gli uomini vivono
E i loro baci li seguono da lontano

Era un tempo irragionevole
Si mettevano i morti in tavola
Si facevano dei castelli di sabbia
Si scambiavano i lupi per dei cani
Tutto si poteva equivocare
Non era una commedia divertente
Se io non recitavo bene la mia parte
Non se ne capiva niente

Nel quartiere Hohenzollern
Fra la Sarre e le caserme
Come i fiori dell’erba medica
Fiorivano i seni di Lola
Aveva un cuore di rondine
Sul divano del bordello
Venivo ad allungarmi accanto a lei
Fra i singhiozzi della pianola

È così che gli uomini vivono
E i loro baci li seguono da lontano

Il cielo era grigio di nuvole
Ci volavano delle oche selvagge
Che passando gridavano la morte
Sopra le case sul lungofiume
Le guardavo alla finestra
Il loro canto triste entrava nel mio essere
E io credevo di riconoscere
Maria Rilke di Ranier.

Era scura, eppure bianca
I suoi capelli cadevano sulle sue anche
E durante la settimana, e di domenica
Apriva a tutti le sue braccia nude
Aveva occhi di maiolica
Lavorava con coraggio
Per un artigliere di Mayence
Che non è mai ritornato

È così che gli uomini vivono
E i loro baci li seguono da lontano

Appartiene ad altri soldati in città
E di notte arrivano i civili
Rimetti del rimmel alle tue ciglia
Lola che te ne andrai presto
Ancora un bicchiere di liquore
Fu ad aprile, alle cinque
Di mattina, che nel tuo cuore
Un drago affondava il suo coltello

È così che gli uomini vivono
E i loro baci li seguono da lontano

Come dei soli passati

Contributed by Lele Felice - 2009/1/24 - 22:54


Lele,
Ce fut un vrai plaisir et même, une saine jouissance de lire ta traduction. En fait, je me demandais si quelqu'un oserait et le faire si bien... Bref, merci.

Bien cordial
OsR
Marco Valdo M.I.

Marco Valdo M.I. - 2009/1/24 - 23:47


spiace contraddire l'autorevole giudizio di marco Valdo, ma la traduzione di Lele felice non è una buona traduzione. Un Poema di questo calibro merita chi sappia riprodurne l'intensità che emana, nella nostra bellissima lingua.
Maurizio . 25 giugno 2011

2011/6/26 - 01:46




Language: French

La canzone di Ferré è un libero adattamento della poesia di Aragon intitolata "Bierstube Magie allemande", nella raccolta "Le Roman inachevé" (1956), nel capitolo "La guerre et ce qui s’en suivit".
Altri artisti hanno interpretato questo testo, come Daniel Bougnoux, Liselotte Hamm e Jean-Marie Humel.
BIERSTUBE MAGIE ALLEMANDE

Bierstube Magie allemande
Et douces comme un lait d'amandes
Mina Linda lèvres gourmandes
qui tant souhaitent d'être crues
A fredonner tout bas s'obstinent
L'air Ach du lieber Augustin
Qu'un passant siffle dans la rue

Sofienstrasse Ma mémoire
Retrouve la chambre et l'armoire
L'eau qui chante dans la bouilloire
Les phrases des coussins brodés
L'abat-jour de fausse opaline
Le Toteninsel de Boecklin
Et le peignoir de mousseline
qui s'ouvre en donnant des idées

Au plaisir prise et toujours prête
O Gaense-Liesel des défaites
Tout à coup tu tournais la tête
Et tu m'offrais comme cela
La tentation de ta nuque
Demoiselle de Sarrebrück
Qui descendais faire le truc
Pour un morceau de chocolat

Et moi pour la juger que suis-je
Pauvres bonheurs pauvres vertiges
Il s'est tant perdu de prodiges
Que je ne m'y reconnais plus
Rencontres Partances hâtives
Est-ce ainsi que les hommes vivent
Et leurs baisers au loin les suivent
Comme des soleils révolus

Tout est affaire de décors
Changer de lit changer de corps
A quoi bon puisque c'est encore
Moi qui moi-même me trahis
Moi qui me traîne et m'éparpille
Et mon ombre se déshabille
Dans les bras semblables des filles
Où j'ai cru trouver un pays

Coeur léger coeur changeant coeur lourd
Le temps de rêver est bien court
Que faut-il faire de mes jours
Que faut-il faire de mes nuits
Je n'avais amour ni demeure
Nulle part où je vive ou meure
Je passais comme la rumeur
je m'endormais comme le bruit

C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenait mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien

Dans le quartier Hohenzollern
Entre la Sarre et les casernes
Comme les fleurs de la luzerne
Fleurissaient les seins de Lola
Elle avait un coeur d'hirondelle
Sur le canapé du bordel
Je venais m'allonger près d'elle
Dans les hoquets du pianola

Elle était brune et pourtant blanche
Ses cheveux tombaient sur ses hanches
Et la semaine et le dimanche
Elle ouvrait à tous ses bras nus
Elle avait des yeux de faïence
Et travaillait avec vaillance
Pour un artilleur de Mayence
Qui n'en est jamais revenu

Il est d'autres soldats en ville
Et la nuit montent les civils
Remets du rimmel à tes cils
Lola qui t'en iras bientôt
Encore un verre de liqueur
Ce fut en avril à cinq heures
Au petit jour que dans ton coeur
Un dragon plongea son couteau

Le ciel était gris de nuages
Il y volait des oies sauvages
Qui criaient la mort au passage
Au-dessus des maisons des quais
Je les voyais par la fenêtre
Leur chant triste entrait dans mon être
Et je croyais y reconnaître
Du Rainer Maria Rilke

Contributed by B.B. - 2014/11/19 - 10:34




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