Une dignité et une volonté libertaires,
Une vie calme et bien rangée,
Sont des principes élémentaires
Et une guerre, déclenchée
Soudain, a tout fait crouler.
On ne peut leur pardonner.
Grondements lourds des mécaniques,
Peur, colère, mouvements sismiques,
La terreur ancienne s’est réveillée.
La terre se trémousse effarée.
Perplexe, le monde regarde
Et la Zinovie se lézarde.
Le Guide a ressorti les vieux chars,
Perclus, de leurs hangars.
Vestiges des carnavals éculés ;
Les chars roulent, roulent, roulent.
Les chars hagards ont reculé,
Sur les routes du pays envahi.
Les navires coulent, coulent, coulent
Dans le vieux port endormi.
Le sang goutte, goutte après goutte,
On sent déjà venir l’inconcevable déroute,
L’insolite blessure, l’incurable déchirure.
Enfin, la décomposition se fait moisissure.
La voix sourde de Grand-Mère retentit.
La fille de là-bas dit : J’ai menti
À personne, je n’ai dit que je venais ici.
Toutes les filles libres de Perse le font
Pour vivre en ce pays infécond.
Et les hommes mentent aussi
Aux gardiens, aux nervis du régime
Qu’au fond de soi, personne n’estime.
Les gens cachent les antennes paraboliques,
Les livres, les alcools diaboliques.
On dissimule nos corps, on baisse la vue,
On s’enterre toutes vives dans les rues.
Pour sortir, on enfile la robe noire ;
Sur les cheveux, on met le foulard.
Ombres de ce pays de trépassés,
On ne regarde pas le passant passer.
Ils peuvent tout nous prendre,
Ils peuvent nous mettre à terre,
Ils peuvent nous pendre,
Ils peuvent nous faire taire.
Ils ne peuvent pas capturer nos idées,
Ils ne peuvent pas éteindre la pensée,
Solitaire au cœur de la foule,
Sous les cheveux, elle coule, coule, coule.
Une vie calme et bien rangée,
Sont des principes élémentaires
Et une guerre, déclenchée
Soudain, a tout fait crouler.
On ne peut leur pardonner.
Grondements lourds des mécaniques,
Peur, colère, mouvements sismiques,
La terreur ancienne s’est réveillée.
La terre se trémousse effarée.
Perplexe, le monde regarde
Et la Zinovie se lézarde.
Le Guide a ressorti les vieux chars,
Perclus, de leurs hangars.
Vestiges des carnavals éculés ;
Les chars roulent, roulent, roulent.
Les chars hagards ont reculé,
Sur les routes du pays envahi.
Les navires coulent, coulent, coulent
Dans le vieux port endormi.
Le sang goutte, goutte après goutte,
On sent déjà venir l’inconcevable déroute,
L’insolite blessure, l’incurable déchirure.
Enfin, la décomposition se fait moisissure.
La voix sourde de Grand-Mère retentit.
La fille de là-bas dit : J’ai menti
À personne, je n’ai dit que je venais ici.
Toutes les filles libres de Perse le font
Pour vivre en ce pays infécond.
Et les hommes mentent aussi
Aux gardiens, aux nervis du régime
Qu’au fond de soi, personne n’estime.
Les gens cachent les antennes paraboliques,
Les livres, les alcools diaboliques.
On dissimule nos corps, on baisse la vue,
On s’enterre toutes vives dans les rues.
Pour sortir, on enfile la robe noire ;
Sur les cheveux, on met le foulard.
Ombres de ce pays de trépassés,
On ne regarde pas le passant passer.
Ils peuvent tout nous prendre,
Ils peuvent nous mettre à terre,
Ils peuvent nous pendre,
Ils peuvent nous faire taire.
Ils ne peuvent pas capturer nos idées,
Ils ne peuvent pas éteindre la pensée,
Solitaire au cœur de la foule,
Sous les cheveux, elle coule, coule, coule.
Contributed by Marco Valdo M.I. - 2023/10/5 - 12:19
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Chanson française — Les Grondements — Marco Valdo M.I. — 2023
LA ZINOVIE
est le voyage d’exploration en Zinovie, entrepris par Marco Valdo M. I. et Lucien l’âne, à l’imitation de Carl von Linné en Laponie et de Charles Darwin autour de notre Terre et en parallèle à l’exploration du Disque Monde longuement menée par Terry Pratchett.
La Zinovie, selon Lucien l’âne, est ce territoire mental où se réfléchit d’une certaine manière le monde. La Zinovie renvoie à l’écrivain, logicien, peintre, dessinateur, caricaturiste et philosophe Alexandre Zinoviev et à son abondante littérature.
Épisode 160
Leonid Petrovich Baikov – 1971
Pour le titre, Lucien l’âne mon ami, le mot m’en est venu en serinant une chanson d’amour.
Quoi ?, dit Lucien l’âne, une chanson d’amour ?
Mais oui, répond Marco Valdo M.I., une chanson d’amour. Et d’ailleurs, pourquoi pas ? Mais rassure-toi, pas n’importe quelle chanson d’amour. Une chanson un peu médiévale que fredonnait Brassens – elle s’intitule « À l’ombre du cœur de ma mie » a – dans laquelle on trouve ces mots :
Ont fait peur aux enchantements... »
Et à bien y penser, quand on la confronte à la guerre, on dirait qu’elle veut dire ceci que les mensonges de la propagande et les grondements des armées ont fait peur et fuir la paix de la vie des hommes et de toute la planète et obligent pour les défende à recourir à l’arbalète.
Que je suis devenu chasseur,
Que mon arbalète à la main,
Je cours les bois et les chemins. »
Voilà ce qui me trottait en tête et qui m’a donné le titre de cette chanson.
Fort bien, dit Lucien l’âne, mais encore ? Au fait qui serait donc cet oiseau de malheur ? Évidemment, tout le monde aura compris qui est cet étourneau, stupide oiseau piaillant, qui vole en nuages noirs au-dessus des plaines et ravage les récoltes.
Mais encore ?, reprend Marco Valdo M.I., c’est comme à l’ordinaire un peu difficile de donner une réponse satisfaisante et détaillée, tant la canzone est complexe. Cette complexité est d’ailleurs ce qui fait son intérêt ; elle oblige à s’arrêter, elle oblige à réfléchir, elle oblige à mobiliser la pensée. Mais je vais résumer : les deux premières strophes font une histoire de la guerre en partant du moment où règne la paix
Une vie calme et bien rangée,
Sont des principes élémentaires
Et une guerre, déclenchée
Soudain, a tout fait crouler. »
et en terminant par l’effondrement et le règne de la moisissure.
On sent déjà venir l’inconcevable déroute,
L’insolite blessure, l’incurable déchirure.
Enfin, la décomposition se fait moisissure. »
Oui, dit Lucien l’âne, c’est une bonne description de l’histoire d’une guerre et du sort détestable qu’elle entraîne, surtout chez le fauteur. Et le reste alors ?
Le reste ?, Lucien l’âne mon ami, le reste est une intervention de la Grand-Mère qui entend faire connaître la voix des filles de là-bas, qu’elle tire du livre « Lire Lolita à Téhéran - récit » de l’écrivaine iranienne Azar Nafisi. Alors, que dit-elle cette fois ? Que là-bas, sans doute comme en Zinovie, tout le monde – filles, femmes, hommes, enfants, vieillards – tout le monde se doit de mentir aux gens du régime, tout le monde se doit d’entretenir au fond de soi la pensée solitaire qui « sous les cheveux, coule, coule, coule. »
Oh, dit Lucien l’âne, comme elle a bien raison cette chanson. J’ajouterais que pour être libre, la pensée se doit de se garder toujours solitaire. Oui, depuis que je cours le monde, j’ai constaté que la pensée libre ne pouvait survivre, se préserver et fleurir que solitaire. Cela dit, tissons le linceul de ce vieux monde rabougri, étouffant, trépassé et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Tous les épisodes précédents sont accessibles ici :
Épisode 1 : Actualisation nationale ; Épisode 2 : Cause toujours ! ; Épisode 3 : L’Erreur fondamentale ; Épisode 4 : Le Paradis sur Terre ; Épisode : Les Héros de l’Histoire ; Épisode 6 : L’Endémie ; Épisode 7 : La Réalité ; Épisode 8 : La Carrière du Directeur ; Épisode 9 : Vivre en Zinovie ; Épisode 10 : Le But final ; Épisode 11 : Les nouveaux Hommes ; Épisode 12 : La Rédaction ; Épisode 13 : Glorieuse et grandiose Doussia ; Épisode 14 : Le Bataillon des Suicidés ; Épisode 15 : Les Gens ; Épisode 16 : Jours tranquilles au Pays ; Épisode 17 : La Région ; Épisode 18 : Mémoires d’un Rat militaire ; Épisode 19 : L’inaccessible Rêve ; Épisode 20 : La Gastronomie des Étoiles ; Épisode 21 : Le Progrès ; Épisode 22 : Faire ou ne pas faire ; Épisode 23 : Le Bonheur des Gens ; Épisode 24 : La Sagesse des Dirigeants ; Épisode 25 : Les Valeurs d’Antan ; Épisode 26 : L’Affaire K. ; Épisode 27 : L’Atmosphère ; Épisode 28 : La Nénie de Zinovie ; Épisode 29 : L’Exposition colossale ; Épisode 30 : La Chasse aux Pingouins ; Épisode 31 : Le Rêve et le Réel ; Épisode 32 : La Vérité de l'État ; Épisode 33 : La Briqueterie ; Épisode 34 : L’Armée des Chefs ; Épisode 35 : C’est pas gagné ; Épisode 36 : Les Trois’z’arts ; Épisode 37 : La Porte fermée ; Épisode 38 : Les Puces ; Épisode 39 : L’Ordinaire de la Guerre ; Épisode 40 : La Ville violée ; Épisode 41 : La Vie paysanne ; Épisode 42 : La Charrette ; Épisode 43 : Le Pantalon ; Épisode 44 : La Secrète et la Poésie ; Épisode 45 : L’Édification de l’Utopie ; Épisode 46 : L’Ambition cosmologique ; Épisode 47 : Le Manuscrit ; Épisode 48 : Le Baiser de Paix ; Épisode 49 : Guerre et Paix ; Épisode 50 : La Queue ; Épisode 51 : Les Nullités ; Épisode 52 : La Valse des Pronoms ; Épisode 53 : La Philosophie spéciale ; Épisode 54 : Le Pays du Bonheur ; Épisode 55 : Les Pigeons ; Épisode 56 : Les Temps dépassés ; Épisode 57 : La Faute à la Contingence ; Épisode 58 : Guerre et Sexe ; Épisode 59 : Une Rencontre en Zinovie ; Épisode 60 : La Grande Zinovie ; Épisode 61 : La Convocation ; Épisode 62 : Tatiana ; Épisode 63 : L’Immolation ; Épisode 64 : Que faire ? 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