Isolés de la populace
Par un mur en duralumin,
Les privilégiés de première classe,
Sur le cuir, posent leur popotin ;
Tout constipés, derrière la glace,
Leur beau ticket vert à la main,
Pour quelques centimes de surtaxe,
Ils emmerdent le genre humain.
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Il n’y a là, que des douairières,
Entre deux toasts, entre deux thés,
Qui, le dimanche, s’offrent une croisière,
De Lamarck à la Trinité.
Il n’y a là, que des rombières,
Talons pointus, envisonnées,
Cils en carton et cœur de pierre,
Et les tétons amidonnés.
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Dans ces fourgons frigorifiques,
J’allais oublier ces Dupont,
Qui, comme titre honorifique,
Pour eux tout seuls, se payent un wagon !
D’autres reçoivent la rosette,
La croix des vaches au Panthéon :
C’est à Notre-Dame de Lorette,
Que vit le mérite de la nation !
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
C’est là qu’ils se défoulent un
Brin, un petit chouïa, un tantinet,
Qu’ils se prennent pour l’agent zéro-un
En Mercedes comme au ciné.
Leur rêve, c’est d’aller dans la glaise
En corbillard de première classe,
Un pied-à-terre au Père Lachaise
Plus grand que le dôme du Val de Grâce.
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Oui, c’est ainsi que nous vivons,
Chacun de nous numéroté,
Depuis les rois et les wagons,
Jusqu’à la Sainte-Trinité.
Alors, Bon Dieu ! Ne me parlez
Plus de l’égalité des races,
Même le métro vous rit au nez,
De Sébasto à Montparnasse !
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Par un mur en duralumin,
Les privilégiés de première classe,
Sur le cuir, posent leur popotin ;
Tout constipés, derrière la glace,
Leur beau ticket vert à la main,
Pour quelques centimes de surtaxe,
Ils emmerdent le genre humain.
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Il n’y a là, que des douairières,
Entre deux toasts, entre deux thés,
Qui, le dimanche, s’offrent une croisière,
De Lamarck à la Trinité.
Il n’y a là, que des rombières,
Talons pointus, envisonnées,
Cils en carton et cœur de pierre,
Et les tétons amidonnés.
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Dans ces fourgons frigorifiques,
J’allais oublier ces Dupont,
Qui, comme titre honorifique,
Pour eux tout seuls, se payent un wagon !
D’autres reçoivent la rosette,
La croix des vaches au Panthéon :
C’est à Notre-Dame de Lorette,
Que vit le mérite de la nation !
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
C’est là qu’ils se défoulent un
Brin, un petit chouïa, un tantinet,
Qu’ils se prennent pour l’agent zéro-un
En Mercedes comme au ciné.
Leur rêve, c’est d’aller dans la glaise
En corbillard de première classe,
Un pied-à-terre au Père Lachaise
Plus grand que le dôme du Val de Grâce.
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
Oui, c’est ainsi que nous vivons,
Chacun de nous numéroté,
Depuis les rois et les wagons,
Jusqu’à la Sainte-Trinité.
Alors, Bon Dieu ! Ne me parlez
Plus de l’égalité des races,
Même le métro vous rit au nez,
De Sébasto à Montparnasse !
Dans les wagons de première classe
Du métropo-po-politain,
Il n’y a pas de cris, il n’y a pas de crasse,
Pas de pinces-culs prolétariens !
envoyé par Marco Valdo M.I. - 28/3/2021 - 12:00
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Chanson française – Dans les Wagons de Première Classe – Henri Tachan – 1965
Jean Edouard Vuillard - 1908
Voici, commence Marco Valdo M.I., une illustration métropolitaine (adjectif qui veut dire de « grande ville » et qui comme nom désigne le Métropolitain – qui est le métro de Paris) de La Guerre de Cent mille ans que les riches et les puissants font aux pauvres pour maintenir leur domination, défendre leurs privilèges, étendre le champ de leur pouvoir, accroître leurs prérogatives, augmenter leurs richesses et nourrir leur ambition.
Ah, dit Lucien l’âne, on en parle souvent de cette guerre, mais je n’avais jamais encore entendu évoquer une telle illustration. Je suis donc fort intéressé à connaître ce qui peut bien se cacher sous cette expression.
Tout simplement une chanson, évidemment, dit Marco Valdo M.I. ; et tout d’abord, un petit topo s’impose. Pour la clarté, je rappelle que la plupart des noms propres cités dans ce parcours subferroviaire sont des noms de stations de métro de Paris – j’ajoute entre parenthèses la date d’inauguration : de Lamarck (1912) à la Trinité (1910), de Notre-Dame de Lorette (1910) au Panthéon, du Père Lachaise (1903), de Sébasto (1904) à Montparnasse (1906). Donc, ce topo : depuis fort longtemps, les humains se regroupent et forment des agglomérations, lesquelles deviennent de plus en plus grandes et de plus en plus peuplées. On signale à présent des métropoles de plusieurs millions d’habitants et même, on dénombre quelques cités de plus de vingt millions d’habitants. C’est considérable et entraîne toutes sortes de conséquences. Ainsi, depuis longtemps, dans les conurbations atteintes de gigantisme se posent des problèmes de circulation et une des solutions pour éviter les embarras superficiels est de construire sous le sol ; c’est le métro, dont les premières lignes sont apparues à la fin du XIXe siècle.
Oui, oui, tout ça, je le sais, répond Lucien l’âne, mais ce que je ne vois toujours pas, c’est ce qu’il en est de la chanson.
J’y viens, Lucien l’âne mon ami. Ici, il s’agit du métro de Paris, dit le Métropolitain, lequel comporte deux classes destinées aux usagers – car à Paris, les clients du métro (qui est un organisme public – La Régie Autonome des transports parisiens, dit communément la RATP) ne sont pas des voyageurs, mais des usagers. On a donc pour tout le monde, pour le peuple, les wagons de deuxième classe, qui aux heures utiles sont la plupart du temps pleins à craquer, une foule s’y presse et pour ceux qui peuvent se le payer (censément les plus riches), une autre classe, plus chique…
Quoi, dit Lucien l’âne, même La Rousse et le Petit Robert disent que chic doit toujours rester invariable en genre.
Oui, je sais, Lucien l’âne mon ami, il serait plus chic de laisser chic invariable, mais ce serait terriblement snob de ne pas écrire chique comme de ne pas écrire une classe snobe – pourquoi, en effet, rejeter le féminin des mots ? Donc pour en revenir à cette autre classe plus chique, plus snobe, plus chère, on la dénomme la Ière Classe. Cette division sociale du métro est le cœur du sujet de la chanson ; c’est le thème moteur de son récit. Elle montre la division sociale, économique à laquelle sacrifie cet utile moyen de transport ; fort heureusement, on n’a pas (encore ?) créer cette distinction sur les trottoirs des villes.
Oh, dit Lucien l’âne, il n’est pas impossible qu’on le fasse, comme on pourrait étendre ce genre de mesure aux routes, aux places et même, aux files dans les commerces.
Ainsi, reprend Marco Valdo M.I., la chanson se fait l’écho du sentiment populaire vis-à-vis de cette discrimination métropolitaine. Cependant, et c’est sa particularité, au lieu de décrire la foule, la presse qui étouffe dans les wagons de deuxième classe, elle focalise sur le vide contrasté du wagon de Ière classe et décrit la clientèle qui s’y tient, à l’aide, dans son cocon, loin de la populace et des pinces-culs prolétariens. C’est un portrait au picrate de ces dames et messieurs de la bourgeoisie.
Ah oui, je vois, dit Lucien l’âne, je vois de quel genre de gens il s’agit ; de ceux qui prennent les autres de haut, même quand ils roulent en sous-sol. Enfin, voyons ça et reprenons notre longue tâche et tissons le linceul de ce vieux monde méprisant, ambitieux, arrogant, avide et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane