Ce sera une grande catastrophe, dit ma mère ;
Le sang coulera, le frère tuera le frère.
Avec ces Allemands, ce sera une grande guerre
Finalement, dit ma grand-mère.
Les Allemands viennent en longues files.
On dit qu’ils exterminent.
On dit qu’ils vont détruire la ville.
On est partis dans les collines
Les ballistes incendient les maisons des partisans.
D’ici dans la nuit, on voit, les flammes
Trembler sur le ciel étoilé d’occident,
Le vent emporte la colère des femmes.
C’est ma maison qui flambe, hourra !
Monte là-dessus et tu verras Istanboul !
Qui déjà est partisan chez toi ?
Mon oncle, ma tante, mon frère, une foule !
Alors, demain, ta maison brûlera,
Brûleront les livres turcs de grand-père,
L’armoire et le coffre de grand-mère.
Et ma poupée, toute seule, là en bas ?
Mémé dernière, papa devant,
Au champ d’aviation, on s’arrête ; prudence !
En face, les feux s’éteignent en silence.
Les ballistes ont fusillé les partisans.
On rentre en ville en fin de nuit.
Les Allemands n’ont rien détruit.
Devant la maison, sur un mort, un papier :
Espion, mort au fascisme, liberté !
Le sang coulera, le frère tuera le frère.
Avec ces Allemands, ce sera une grande guerre
Finalement, dit ma grand-mère.
Les Allemands viennent en longues files.
On dit qu’ils exterminent.
On dit qu’ils vont détruire la ville.
On est partis dans les collines
Les ballistes incendient les maisons des partisans.
D’ici dans la nuit, on voit, les flammes
Trembler sur le ciel étoilé d’occident,
Le vent emporte la colère des femmes.
C’est ma maison qui flambe, hourra !
Monte là-dessus et tu verras Istanboul !
Qui déjà est partisan chez toi ?
Mon oncle, ma tante, mon frère, une foule !
Alors, demain, ta maison brûlera,
Brûleront les livres turcs de grand-père,
L’armoire et le coffre de grand-mère.
Et ma poupée, toute seule, là en bas ?
Mémé dernière, papa devant,
Au champ d’aviation, on s’arrête ; prudence !
En face, les feux s’éteignent en silence.
Les ballistes ont fusillé les partisans.
On rentre en ville en fin de nuit.
Les Allemands n’ont rien détruit.
Devant la maison, sur un mort, un papier :
Espion, mort au fascisme, liberté !
Contributed by Marco Valdo M.I. - 2020/6/7 - 22:13
×
Note for non-Italian users: Sorry, though the interface of this website is translated into English, most commentaries and biographies are in Italian and/or in other languages like French, German, Spanish, Russian etc.
Chanson française – Et ma poupée ? – Marco Valdo M.I. – 2020
Quelques histoires albanaises, tirées de nouvelles d’Ismaïl Kadaré, traduites par Christian GUT et publiées en langue française en 1985 sous le titre La Ville du Sud.(7)
Laisse-moi, Lucien l’âne mon ami, d’abord te conter une petite anecdote à propos de nos petits dialogues maïeutiques.
Soit, dit Lucien l’âne.
Donc, reprend Marco Valdo M.I., il y a quelques jours notre ami R.V. dans le commentaire introductif qu’il consacrait à la chanson Asia de Francesco Guccini, dont je compte faire prochainement la version française, et la clôture peut-être provisoire, probablement selon moi, du Chansonnier du Coronavirus – qui, soit dit en passant comporte 140 chansons et je pense même qu’il en manque.
Oh, dit Lucien l’âne, une anecdote ? Pourquoi pas ? C’est toujours distrayant.
Ainsi, dans le commentaire que je t’ai dit, Lucien l’âne mon ami, R.V., qui administre avec un brio et une maestria diabolica, ce site des Chansons contre la Guerre (auquel nous collaborons volontiers), y introduit, écrit et traduit moultes chansons, dit ceci : « Dans ce cas, je laisse (faire) à chacun des considérations, des réflexions, des suggestions, des histoires, de la géographie et de la politique ; comment dire, j’invite vraiment chacun à se faire son Dialogue Maïeutique comme font Marco Valdo M.I. et Lucien Lane. Ceci, à la rigueur, est le mien (assaisonné à la diabolique)… »
Eh bien, dit Lucien l’âne, nous voilà en quelque sorte diaboliquement canonisés ; je n’en espérais pas tant. Maintenant, dis-moi, la chanson raconte réellement une histoire de poupée ?
Si on veut, oui, répond Marco Valdo M.I., mais pas seulement. Elle continue la saga familiale de Gjirokastër dans la guerre, vue par un enfant. Pour rappel, on se trouve – fin 1940 – dans cette petite ville du Sud de l’Albanie, proche de la frontière grecque. Les envahisseurs italiens y passent dans un sens, puis dans l’autre à leur retour, poursuivis par les Grecs ; puis, c’est au tour des Grecs de reculer face aux Allemands. Je te rappelle que tous ces trois belligérants sont des pays sous régime fasciste ou nazi.
Rien là que de très habituel, dit Lucien l’âne. Ces allées et venues sont les aléas de la guerre. Donc, on en est à l’arrivée des Allemands qui s’en vont vers la Grèce.
Exactement, Lucien l’âne mon ami, mais eux n’en sont encore qu’à l’aller – moment exaltant et victorieux et ils sont précédés d’une réputation des plus épouvantables ; on dit que ce sont des massacreurs fort réputés. En marge de ces allés-retours des étrangers au travers de l’Albanie, il y les règlements de compte des Albanais entre eux. Ce sont des procédés incendiaires et meurtriers.
Mais, dit Lucien l’âne, si je comprends bien, sous la guerre militaire des étrangers, il y a la guerre civile des Albanais.
Oui, c’est à peu près ça, dit Marco Valdo M.I. et l’affaire se présente ainsi : les fascistes albanais, qu’on nomme les « ballistes », se rallient à l’occupant et tuent les partisans, opposés aux occupants, et les partisans tuent les « ballistes ». Tout ça se passe de façon civile, c’est-à-dire clandestinement, de préférence la nuit, et un à la fois. À la rigueur, par petits groupes. Dans cette agitation, l’enfant qui nous raconte l’histoire, suit le parcours de sa famille laquelle, à l’annonce de l’arrivée des Allemands, s’exile dans un village des collines voisines et qui contemple avec effroi – les adultes et avec animation – les enfants, la ville où rougeoient des incendies. C’est durant cette nuit d’exode que la petite fille pleure sa poupée, restée à la maison. Puis, toute la famille revient au petit jour. Le reste est dit dans la chanson.
Au fait, dit Lucien l’âne, ce doit être les actions des « ballistes », car j’imagine que s’ils avaient eu pareille intention, les Allemands auraient agi en plein jour, rasé toute la ville et massacré les habitants. Ils auraient mis la chose sur le compte des représailles. Quant à nous, nous tissons le linceul de ce vieux monde plein de fureur et de bruits, incendiaire, assassin, sentimental et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane