Boris Vian: Lettre à sa Magnificence le Baron Jean Mollet Vice-Curateur du Collège de 'Pataphysique sur les truqueurs de la guerre'
GLI EXTRA DELLE CCG / AWS EXTRAS / LES EXTRAS DES CCGLanguage: French
L'on s'en doutait parfois, comme je ne saurais l'apprendre à Votre Magnificence, mais le doute n'est plus possible ; le moment est venu de le dire au grand jour ; la guerre est truquée. Quelle guerre ? Je n'en mets aucune spécialement en cause ; à mon avis, il n'y en a pas encore eu une bonne, et l'on verra pourquoi. Il me semble, et c'est tout, utile et urgent d'attirer l'attention des bons citoyens sur le mauvais usage que l'on fait de leurs deniers.
C'est le hasard d'une rencontre qui m'a mis la puce à la cervelle. Obligé, récemment, de laisser au garage mon char à essence (la paresse, je crains) j'eus l'idée, pour gagner le lieu clos où je travaille, dans un silence approximatif, à préparer la mise en conserve de ces aliments spécifiques de l'oreille, les vibrations musicales, j'eus, disais-je, l'idée de prendre l'autobus. Il n'était pas fort encombré et c'est ainsi que je trouvai place vis-à-vis d'un homme âgé. Son âge était-il respectable ? Je n'ai pas accoutumé de respecter ou de mépriser ; je choisis plutôt parmi cette gamme de sentiments qui vont de l'amour à la haine en passant par les degrés de l'affection, de l'indifférence et de l'inimitié. Bref, j'étais en face d'un homme de soixante-neuf ans, nombre pour lequel je n'éprouve non plus aucun respect particulier ; il n'est, à tout prendre, qu'un symbole et je n'en suis point, j'en remercie Votre Magnificence, à m'effrayer d'un symbole qui restera, quelle que soit la force de l'éruption, sous mon entière domination.
Pour en venir au fait, le revers du veston de ce vieil énantiomorphe de moi-même portait quelques fragments de rubans colorés, noués à la boutonnière ; curieux de nature, je me permis d'en demander l'usage.
— Celui-ci, me dit-on, est la Médaille militaire. L'autre, la Croix de Guerre. Et voici la Légion d'honneur de Lyon. La rosette.
— Je ne vois ni médaille ni croix, observai-je, mais de jolis galons de couleur. Serait-ce qu'il y eut une guerre et que vous...
— Quatorze-Dix-huit, fit-il, me coupant la parole, mais sans insolence.
— Je m'exprime mal, repris-je, seriez-vous revenu de la guerre ?
— Sans une égratignure, jeune homme.
La canaille semblait s'en vanter.
— Voulez-vous me dire, poursuivis-je (d'un ton que j'avais quelque peine à modérer), que cette guerre de Quatorze a été mal faite ?
Magnificence, je passe sur la suite de ce colloque. Il devait m'apporter cette triste certitude : oui, on nous trompe ; oui, les guerres sont mal faites ; oui, il y a des survivants parmi les combattants. Oh ! j'imagine que Votre Magnificence va hausser les épaules. Il s'emporte, pensera-t-Elle, avec un léger sourire et ce mouvement du chef que je connais bien. Il se fait des idées... On lui aura monté le bourrichon...
Eh bien non. J'ai fait mon enquête ; elle est concluante. La vérité est affreuse : toute noire avec du rosé en plaques ; la voici : à chaque guerre, des milliers de combattants reviennent sains et saufs.
*
* *
Je me garderai d'insister sur le danger psychologique de ce triste état de choses : il est précis, colossal, monstrueux ; l'individu qui revient d'une guerre a, obligatoirement, plus ou moins l'idée qu'elle n'était pas dangereuse. Ceci concourt à l'échec de la suivante, et ne fait pas prendre au sérieux les guerres en général. Mais ce ne serait rien. Le combattant qui ne s'est pas fait tuer garde en lui-même une mentalité de raté ; il aura à cœur de compenser cette déficience et contribuera donc à préparer la suivante ; or comment voulez-vous qu'il la prépare bien, puisqu'il s'est tiré de la précédente et que par conséquent, du point de vue de la guerre, il est disqualifié ?
Mais je le répète, je ne traînerai pas sur l'aspect intérieur de la chose. Le côté social est plus grave. Voici, Magnificence, ce à quoi l'on utilise l'argent que vous versez ; voilà ce que l'on fait du mien, de nos impôts, de nos efforts. Voilà ce que l'on fait du travail de ces dizaines de milliers de braves ouvriers qui, du matin au soir, d'un bout de l'année à l'autre, s'épuisent à tourner des obus, à fabriquer, au péril de leur vie, des explosifs dangereux dans des établissements pleins de courants d'air, à monter des avions qui, eux non plus, ne devraient pas revenir mais qui reviennent parfois. On m'a cité des cas. La vie blesse.
Oh, qu'une bonne partie de la responsabilité de tout ceci incombe à l'ennemi, cela, Magnificence, je n'en disconviens pas. C'est grave, certes. L'ennemi, lui non plus, ne fait pas son devoir. Mais tout de même, reconnaissons que nous essayons de le gêner. Un ennemi un peu aidé nous détruirait jusqu'au dernier. Or, loin de l'aider, nous lui donnons dans le nez de l'arme rouge, de l'arme blanche, du mortier, du canon, de la bombe variée, du napalm ; si parfois, comme en 1940, nous usons d'une tactique neuve, tentant de l'induire à courir très vite pour tomber à la mer, emporté par son élan, reconnaissons que de tels exemples sont rares et qu'en 1940, en tout cas, la technique n'était pas au point puisque nous n'avons pas sauté dans l'eau les premiers pour l'attirer à notre suite.
Mais, quoi !...à chaque guerre, le même phénomène navrant se reproduit : on engage, en masse, des amateurs. La guerre, pourtant, ce n'est pas n'importe quoi ; c'est fait pour tuer les gens et ça s'apprend. Or, que se passe-t-il ? Chaque fois, dans les deux camps, au lieu de confier à des mains professionnelles l'infinité de tâches délicates qui concourent à la réussite des belles campagnes, on embauche des milliers de manœuvres non spécialisés et on les fait instruire par des guerriers professionnels âgés ou de grade inférieur, donc qui ont raté une guerre précédente. Comment veut-on que l'esprit des recrues — et certaines ne demanderaient pas mieux que de se dévouer à la cause de la guerre — acquière les qualités nécessaires à la réalisation parfaite d'une guerre idéale ? Sans nous y attarder, ne faisons qu'effleurer au passage le terme " mobilisation ". Croyez-vous que le dessein du législateur, en employant ce mot, ait été, justement, d'" immobiliser " les mobilisés dans les casernes ? Pour moi, éclairé que je suis déjà par mes réflexions, la contradiction ne saurait surprendre ; elle procède purement et simplement de l'esprit de sabotage entretenu par les survivants des guerres passées.
Imaginons, par un vol majestueux de l'esprit — et celui de Votre Magnificence a l'envergure apte à ces élans immenses — une guerre réussie. Imaginons une guerre où toutes les munitions sont épuisées, tous les ouvriers à court de matières premières, tous les soldats et tous les chefs abattus — et ceci de part et d'autre, dans les deux camps. Ah, je le sais bien, tel résultat exigerait une minutieuse préparation ; et l'on vous déclare les guerres avec une légèreté, une désinvolture, qui rendent irréalisable cette guerre idéale en vue de laquelle, contre toute espérance, nous continuons — et nous continuerons — de verser notre obole quotidienne. Mais imaginons, Magnificence, imaginons ce combat dont pas un combattant ne réchapperait ! Voilà qui serait résoudre le conflit. Car un problème ne se pose pas. Votre Magnificence sait qu'on le pose. Il n'est que de supprimer cet " on ". De même, un conflit sans combattants n'est plus un conflit, et il ne survit jamais à leur disparition.
J'ai vilipendé — non sans raison. Votre Magnificence me l'accordera — les amateurs ; mais le plus triste, c'est que certains professionnels ne font pas leur devoir. Certes, il est inadmissible qu'un mobilisé ordinaire revienne intact du front ; mais c'est qu'on a le tort de mobiliser n'importe qui, et en trop grand nombre. Que Votre Magnificence me donne une armée de cinquante hommes, et je me fais fort de la contrôler ; je lui garantis qu'aucun des cinquante hommes n'en reviendra, dusse-je les abattre de mes mains et sans l'aide de l'ennemi ; mais un million d'hommes. Magnificence... non. Un million, je ne peux plus rien lui garantir. Mais là n'est pas l'argument ; le plus tragique, c'est que des soldats de carrière réchappent de la guerre. Jadis, les officiers chargeaient à la tête de leurs troupes ; ils savaient bien, eux, que leur mort était essentielle à la bonne marche de la guerre, grâce au jeu de l'avancement qui plaçait immédiatement le subalterne le plus qualifié au point le plus dangereux, celui où le chef venait de périr. De nos jours, on semble mettre cette notion de base en doute ; on a vu des généraux modernes dépasser cinquante ans et commander leurs forces depuis des P. C. disposés à l'arrière, voire abrités. L'on m'assure, et je suis tout prêt à le croire, que ceci a l'heureux effet d'étendre le champ des opérations et de multiplier ainsi les risques, en allongeant l'attaque adverse ; les avions, me dit-on, sont actuellement assez nombreux pour inonder de bombes des surfaces importantes. Ce raisonnement me semble suspect ; on sait bien, hélas, que certaines bombes manquent leur but, que toutes, malheureusement, n'explosent pas ; que le maladroit et grossier camouflage grâce auquel on tente de mettre en valeur les cibles de choix voit souvent son effet annulé par la malignité de la nature, qui réussit dans certains cas à l'imiter. Pourtant, on conçoit encore, je l'admets, que les professionnels de la guerre, irrités par l'idée de n'avoir que des amateurs à leur disposition, cherchent à s'en débarrasser le plus vite possible en les expédiant à l'avant-garde. Or, ils y rencontrent d'autres amateurs, ennemis, oui mais aussi maladroits qu'eux-mêmes, et le conflit s'éternise comme il le fit, paraît-il, à Verdun voici une quarantaine d'années, ces pauvres gens ne parvenant pas à s'exterminer malgré l'aide intensive de l'artillerie des deux camps. La discussion est délicate ; il y a, sans doute, à déterminer l'ordre dans lequel il faut éliminer les officiers des différents grades pour obtenir de la guerre son rendement maximum. Des chaussetrapes surgissent à chaque pas : par exemple, si un général est adroit, vaut-il mieux qu'il soit tué rapidement ou non ? Le calcul est délicat. S'il est très adroit, il tue ou fait tuer de nombreux ennemis sans perdre trop d'hommes ; mais s'il ne subit pas de grosses pertes, c'est que le général ennemi devant lequel il se trouve n'est pas très adroit ; en ce cas, comment dire du premier qu'il est très adroit, s'il se borne à triompher de maladroits ? et s'il n'est pas très adroit, ne serait-il pas bon — du point de vue de la guerre, toujours — qu'il fût tué rapidement ? Le problème, je le dis, est très épineux et fait intervenir le calcul des probabilités. Naturellement, on peut dire, en gros, qu'il serait bon qu'un général disparût au moment où il a fait un quota déterminé de victimes ; une étude statistique donnerait des chiffres provisoirement acceptables pour le minimum exigible.
Il ne reste pas moins de tout ceci, pour revenir à l'exemple de l'officier chargeant jadis à la tête de ses troupes, que (et c'était le cas) lorsque des professionnels sont en présence, la guerre réussit beaucoup mieux (tout est relatif) que lorsque les amateurs abondent sur le terrain. Un homme, à mon sens, s'est conduit, jadis, à merveille : c'est celui qui, à Fontenoy, lança la phrase, fameuse à juste titre : " Messieurs les Anglais, tirez les premiers. " A n'en pas douter, dans son esprit, les Français devaient tirer en même temps ; c'était la façon de réaliser un carnage maximum : réunir, au point fixe, les troupes, et se fusiller à bout portant. Sans doute trahi par des subordonnés d'esprit lent, cet homme, ce vrai soldat, n'en obtint pas moins un résultat satisfaisant. Depuis, des stratèges improvisés ont inventé la guerre droite, la guerre de mouvement, la guérilla, le harcèlement, le décrochage, le repli sur des positions préparées (oh ! hideux pléonasme) à l'avance, toutes tactiques qui ont l'avantage de gâcher énormément de matériel et de coûter fort cher, mais qui négligent l'essentiel : la disparition du combattant.
Votre Magnificence me pardonnera le désordre de ces réflexions que je jette tout à trac, notées comme elles me sont venues ; mon indignation n'a pas laissé à ma pensée le temps de filtrer et de mettre à sa place chacun des éléments qui venaient s'offrir à l'alimenter. Cette lettre part du cœur ; je me suis soudain vu bafoué, volé, floué ; nous n'avons pas les guerres pour lesquelles nous payons, et je ne suis pas content : Votre Magnificence ne niera pas qu'il y avait de quoi.
Qu'on se réveille donc, il est temps encore ; allons contre ce courant dangereux qui nous entraîne vers les gouffres. Qu'on me croie : le jour où personne ne reviendra d'une guerre, c'est qu'elle aura enfin été bien faite. Ce jour-là, on s'apercevra que toutes les tentatives avortées jusqu'ici ont été l'oeuvre de farceurs. Ce jour-là, on s'apercevra qu'il suffit d'UNE guerre pour effacer les préjugés qui s'attachent encore à ce mode de destruction. Ce jour-là, il sera, à jamais, inutile de recommencer.
Le 29 sable 86, vacuation de Bombe.
P.-S. — On s'enquiert auprès de moi de la conduite à tenir vis-à-vis de ceux qui reviennent des guerres actuelles. Sachez que cela m'indiffère ; ce sont des guerres falsifiées, il est bien vrai, mais surtout ce ne sont pas mes guerres. En bonne logique, on devrait abattre tous ceux qui reviennent intacts et tolérer — pourvu qu'ils se taisent — ceux qui reviennent partiellement morts, mutilés ou blessés. On préférera, évidemment, ceux qui reviennent déprivés de l'usage de la parole, et l'on interdira absolument à tous, quels qu'ils soient, de se targuer du titre " ancien combattant ". Une seule dénomination convient à cette vermine : celle de " ratés de la guerre ".
1er décervelage 86
Dossier 7 du Collège de 'Pataphysique
(11 gidouilïe 86 = 25 juin 1959).
C'est le hasard d'une rencontre qui m'a mis la puce à la cervelle. Obligé, récemment, de laisser au garage mon char à essence (la paresse, je crains) j'eus l'idée, pour gagner le lieu clos où je travaille, dans un silence approximatif, à préparer la mise en conserve de ces aliments spécifiques de l'oreille, les vibrations musicales, j'eus, disais-je, l'idée de prendre l'autobus. Il n'était pas fort encombré et c'est ainsi que je trouvai place vis-à-vis d'un homme âgé. Son âge était-il respectable ? Je n'ai pas accoutumé de respecter ou de mépriser ; je choisis plutôt parmi cette gamme de sentiments qui vont de l'amour à la haine en passant par les degrés de l'affection, de l'indifférence et de l'inimitié. Bref, j'étais en face d'un homme de soixante-neuf ans, nombre pour lequel je n'éprouve non plus aucun respect particulier ; il n'est, à tout prendre, qu'un symbole et je n'en suis point, j'en remercie Votre Magnificence, à m'effrayer d'un symbole qui restera, quelle que soit la force de l'éruption, sous mon entière domination.
Pour en venir au fait, le revers du veston de ce vieil énantiomorphe de moi-même portait quelques fragments de rubans colorés, noués à la boutonnière ; curieux de nature, je me permis d'en demander l'usage.
— Celui-ci, me dit-on, est la Médaille militaire. L'autre, la Croix de Guerre. Et voici la Légion d'honneur de Lyon. La rosette.
— Je ne vois ni médaille ni croix, observai-je, mais de jolis galons de couleur. Serait-ce qu'il y eut une guerre et que vous...
— Quatorze-Dix-huit, fit-il, me coupant la parole, mais sans insolence.
— Je m'exprime mal, repris-je, seriez-vous revenu de la guerre ?
— Sans une égratignure, jeune homme.
La canaille semblait s'en vanter.
— Voulez-vous me dire, poursuivis-je (d'un ton que j'avais quelque peine à modérer), que cette guerre de Quatorze a été mal faite ?
Magnificence, je passe sur la suite de ce colloque. Il devait m'apporter cette triste certitude : oui, on nous trompe ; oui, les guerres sont mal faites ; oui, il y a des survivants parmi les combattants. Oh ! j'imagine que Votre Magnificence va hausser les épaules. Il s'emporte, pensera-t-Elle, avec un léger sourire et ce mouvement du chef que je connais bien. Il se fait des idées... On lui aura monté le bourrichon...
Eh bien non. J'ai fait mon enquête ; elle est concluante. La vérité est affreuse : toute noire avec du rosé en plaques ; la voici : à chaque guerre, des milliers de combattants reviennent sains et saufs.
*
* *
Je me garderai d'insister sur le danger psychologique de ce triste état de choses : il est précis, colossal, monstrueux ; l'individu qui revient d'une guerre a, obligatoirement, plus ou moins l'idée qu'elle n'était pas dangereuse. Ceci concourt à l'échec de la suivante, et ne fait pas prendre au sérieux les guerres en général. Mais ce ne serait rien. Le combattant qui ne s'est pas fait tuer garde en lui-même une mentalité de raté ; il aura à cœur de compenser cette déficience et contribuera donc à préparer la suivante ; or comment voulez-vous qu'il la prépare bien, puisqu'il s'est tiré de la précédente et que par conséquent, du point de vue de la guerre, il est disqualifié ?
Mais je le répète, je ne traînerai pas sur l'aspect intérieur de la chose. Le côté social est plus grave. Voici, Magnificence, ce à quoi l'on utilise l'argent que vous versez ; voilà ce que l'on fait du mien, de nos impôts, de nos efforts. Voilà ce que l'on fait du travail de ces dizaines de milliers de braves ouvriers qui, du matin au soir, d'un bout de l'année à l'autre, s'épuisent à tourner des obus, à fabriquer, au péril de leur vie, des explosifs dangereux dans des établissements pleins de courants d'air, à monter des avions qui, eux non plus, ne devraient pas revenir mais qui reviennent parfois. On m'a cité des cas. La vie blesse.
Oh, qu'une bonne partie de la responsabilité de tout ceci incombe à l'ennemi, cela, Magnificence, je n'en disconviens pas. C'est grave, certes. L'ennemi, lui non plus, ne fait pas son devoir. Mais tout de même, reconnaissons que nous essayons de le gêner. Un ennemi un peu aidé nous détruirait jusqu'au dernier. Or, loin de l'aider, nous lui donnons dans le nez de l'arme rouge, de l'arme blanche, du mortier, du canon, de la bombe variée, du napalm ; si parfois, comme en 1940, nous usons d'une tactique neuve, tentant de l'induire à courir très vite pour tomber à la mer, emporté par son élan, reconnaissons que de tels exemples sont rares et qu'en 1940, en tout cas, la technique n'était pas au point puisque nous n'avons pas sauté dans l'eau les premiers pour l'attirer à notre suite.
Mais, quoi !...à chaque guerre, le même phénomène navrant se reproduit : on engage, en masse, des amateurs. La guerre, pourtant, ce n'est pas n'importe quoi ; c'est fait pour tuer les gens et ça s'apprend. Or, que se passe-t-il ? Chaque fois, dans les deux camps, au lieu de confier à des mains professionnelles l'infinité de tâches délicates qui concourent à la réussite des belles campagnes, on embauche des milliers de manœuvres non spécialisés et on les fait instruire par des guerriers professionnels âgés ou de grade inférieur, donc qui ont raté une guerre précédente. Comment veut-on que l'esprit des recrues — et certaines ne demanderaient pas mieux que de se dévouer à la cause de la guerre — acquière les qualités nécessaires à la réalisation parfaite d'une guerre idéale ? Sans nous y attarder, ne faisons qu'effleurer au passage le terme " mobilisation ". Croyez-vous que le dessein du législateur, en employant ce mot, ait été, justement, d'" immobiliser " les mobilisés dans les casernes ? Pour moi, éclairé que je suis déjà par mes réflexions, la contradiction ne saurait surprendre ; elle procède purement et simplement de l'esprit de sabotage entretenu par les survivants des guerres passées.
Imaginons, par un vol majestueux de l'esprit — et celui de Votre Magnificence a l'envergure apte à ces élans immenses — une guerre réussie. Imaginons une guerre où toutes les munitions sont épuisées, tous les ouvriers à court de matières premières, tous les soldats et tous les chefs abattus — et ceci de part et d'autre, dans les deux camps. Ah, je le sais bien, tel résultat exigerait une minutieuse préparation ; et l'on vous déclare les guerres avec une légèreté, une désinvolture, qui rendent irréalisable cette guerre idéale en vue de laquelle, contre toute espérance, nous continuons — et nous continuerons — de verser notre obole quotidienne. Mais imaginons, Magnificence, imaginons ce combat dont pas un combattant ne réchapperait ! Voilà qui serait résoudre le conflit. Car un problème ne se pose pas. Votre Magnificence sait qu'on le pose. Il n'est que de supprimer cet " on ". De même, un conflit sans combattants n'est plus un conflit, et il ne survit jamais à leur disparition.
J'ai vilipendé — non sans raison. Votre Magnificence me l'accordera — les amateurs ; mais le plus triste, c'est que certains professionnels ne font pas leur devoir. Certes, il est inadmissible qu'un mobilisé ordinaire revienne intact du front ; mais c'est qu'on a le tort de mobiliser n'importe qui, et en trop grand nombre. Que Votre Magnificence me donne une armée de cinquante hommes, et je me fais fort de la contrôler ; je lui garantis qu'aucun des cinquante hommes n'en reviendra, dusse-je les abattre de mes mains et sans l'aide de l'ennemi ; mais un million d'hommes. Magnificence... non. Un million, je ne peux plus rien lui garantir. Mais là n'est pas l'argument ; le plus tragique, c'est que des soldats de carrière réchappent de la guerre. Jadis, les officiers chargeaient à la tête de leurs troupes ; ils savaient bien, eux, que leur mort était essentielle à la bonne marche de la guerre, grâce au jeu de l'avancement qui plaçait immédiatement le subalterne le plus qualifié au point le plus dangereux, celui où le chef venait de périr. De nos jours, on semble mettre cette notion de base en doute ; on a vu des généraux modernes dépasser cinquante ans et commander leurs forces depuis des P. C. disposés à l'arrière, voire abrités. L'on m'assure, et je suis tout prêt à le croire, que ceci a l'heureux effet d'étendre le champ des opérations et de multiplier ainsi les risques, en allongeant l'attaque adverse ; les avions, me dit-on, sont actuellement assez nombreux pour inonder de bombes des surfaces importantes. Ce raisonnement me semble suspect ; on sait bien, hélas, que certaines bombes manquent leur but, que toutes, malheureusement, n'explosent pas ; que le maladroit et grossier camouflage grâce auquel on tente de mettre en valeur les cibles de choix voit souvent son effet annulé par la malignité de la nature, qui réussit dans certains cas à l'imiter. Pourtant, on conçoit encore, je l'admets, que les professionnels de la guerre, irrités par l'idée de n'avoir que des amateurs à leur disposition, cherchent à s'en débarrasser le plus vite possible en les expédiant à l'avant-garde. Or, ils y rencontrent d'autres amateurs, ennemis, oui mais aussi maladroits qu'eux-mêmes, et le conflit s'éternise comme il le fit, paraît-il, à Verdun voici une quarantaine d'années, ces pauvres gens ne parvenant pas à s'exterminer malgré l'aide intensive de l'artillerie des deux camps. La discussion est délicate ; il y a, sans doute, à déterminer l'ordre dans lequel il faut éliminer les officiers des différents grades pour obtenir de la guerre son rendement maximum. Des chaussetrapes surgissent à chaque pas : par exemple, si un général est adroit, vaut-il mieux qu'il soit tué rapidement ou non ? Le calcul est délicat. S'il est très adroit, il tue ou fait tuer de nombreux ennemis sans perdre trop d'hommes ; mais s'il ne subit pas de grosses pertes, c'est que le général ennemi devant lequel il se trouve n'est pas très adroit ; en ce cas, comment dire du premier qu'il est très adroit, s'il se borne à triompher de maladroits ? et s'il n'est pas très adroit, ne serait-il pas bon — du point de vue de la guerre, toujours — qu'il fût tué rapidement ? Le problème, je le dis, est très épineux et fait intervenir le calcul des probabilités. Naturellement, on peut dire, en gros, qu'il serait bon qu'un général disparût au moment où il a fait un quota déterminé de victimes ; une étude statistique donnerait des chiffres provisoirement acceptables pour le minimum exigible.
Il ne reste pas moins de tout ceci, pour revenir à l'exemple de l'officier chargeant jadis à la tête de ses troupes, que (et c'était le cas) lorsque des professionnels sont en présence, la guerre réussit beaucoup mieux (tout est relatif) que lorsque les amateurs abondent sur le terrain. Un homme, à mon sens, s'est conduit, jadis, à merveille : c'est celui qui, à Fontenoy, lança la phrase, fameuse à juste titre : " Messieurs les Anglais, tirez les premiers. " A n'en pas douter, dans son esprit, les Français devaient tirer en même temps ; c'était la façon de réaliser un carnage maximum : réunir, au point fixe, les troupes, et se fusiller à bout portant. Sans doute trahi par des subordonnés d'esprit lent, cet homme, ce vrai soldat, n'en obtint pas moins un résultat satisfaisant. Depuis, des stratèges improvisés ont inventé la guerre droite, la guerre de mouvement, la guérilla, le harcèlement, le décrochage, le repli sur des positions préparées (oh ! hideux pléonasme) à l'avance, toutes tactiques qui ont l'avantage de gâcher énormément de matériel et de coûter fort cher, mais qui négligent l'essentiel : la disparition du combattant.
Votre Magnificence me pardonnera le désordre de ces réflexions que je jette tout à trac, notées comme elles me sont venues ; mon indignation n'a pas laissé à ma pensée le temps de filtrer et de mettre à sa place chacun des éléments qui venaient s'offrir à l'alimenter. Cette lettre part du cœur ; je me suis soudain vu bafoué, volé, floué ; nous n'avons pas les guerres pour lesquelles nous payons, et je ne suis pas content : Votre Magnificence ne niera pas qu'il y avait de quoi.
Qu'on se réveille donc, il est temps encore ; allons contre ce courant dangereux qui nous entraîne vers les gouffres. Qu'on me croie : le jour où personne ne reviendra d'une guerre, c'est qu'elle aura enfin été bien faite. Ce jour-là, on s'apercevra que toutes les tentatives avortées jusqu'ici ont été l'oeuvre de farceurs. Ce jour-là, on s'apercevra qu'il suffit d'UNE guerre pour effacer les préjugés qui s'attachent encore à ce mode de destruction. Ce jour-là, il sera, à jamais, inutile de recommencer.
Le 29 sable 86, vacuation de Bombe.
P.-S. — On s'enquiert auprès de moi de la conduite à tenir vis-à-vis de ceux qui reviennent des guerres actuelles. Sachez que cela m'indiffère ; ce sont des guerres falsifiées, il est bien vrai, mais surtout ce ne sont pas mes guerres. En bonne logique, on devrait abattre tous ceux qui reviennent intacts et tolérer — pourvu qu'ils se taisent — ceux qui reviennent partiellement morts, mutilés ou blessés. On préférera, évidemment, ceux qui reviennent déprivés de l'usage de la parole, et l'on interdira absolument à tous, quels qu'ils soient, de se targuer du titre " ancien combattant ". Une seule dénomination convient à cette vermine : celle de " ratés de la guerre ".
1er décervelage 86
Dossier 7 du Collège de 'Pataphysique
(11 gidouilïe 86 = 25 juin 1959).
Contributed by Dq82 - 2017/7/28 - 17:29
Language: French
La versione in francese di René Zosso da Chante & Vielle (1968)
Testo fornitoci dallo stesso autore. Probabilmente, la fonte di Beppe Chierici, visto che il taglio rispetto alla lettera originale, è esattamente lo stesso
Testo fornitoci dallo stesso autore. Probabilmente, la fonte di Beppe Chierici, visto che il taglio rispetto alla lettera originale, è esattamente lo stesso
LA GUERRE EST TRUQUÉE
Le moment est venu de le dire au grand jour: la guerre est truquée… La vérite est affreuse: à chaque guerre, des milliers de combattants revienent sains et saufs.
Or, l’individu qui revient de la guerre a, obligatoirement, plus ou moins l’idée qu’elle n’était pas dangereuse. Cela concourt à l’échec de la suivante et ne fait pas prendre au sérieux les guerres en général. Mais ce ne serait ren. Le combattant qui ne s’est pas fait tuer garde en lui une mentalite de raté; il aura à coeur de compenser cette déficience et contribuera donc à préparer la suivante; or, comment voulez-vous qu’il la prépare bien, puisqu’il s’est tiré de la précédente et que, par conséquent, du point de vue de la guerre, il est disqualifié ?
A chaque guerre, le même phenomène navrant se reproduit : on engage en masse, et des amateurs. Dans les deux camps, on embauche des milliers de manoeuvres non spécialisés, et on les fait instruire par des guerriers professionels âgés ou de grades inférieurs, donc qui ont raté une guerre précédente.
Certes, il est inadmissible qu’un mobilisé ordinaire revienne intact du front; mais, le plus tragique, c’est que des soldats de carrière réchappent de la guerre.
Nous n’avons pas les guerres pour lesquelles nous payons, et je ne suis pas content… Le jour où personne ne reviendra d’une guerre, c’est qu’elle aura été bien faite. Ce jour-là, on s’apercevra que toutes les tentatives avortées jusqu’ici ont été l’oeuvre de farceurs. Ce jour-là, on s’apercevra qu’il suffit d’une guerre pour effacer les préjugés qui s’attachent encore à ce mode de destruction. Ce jour-là, il sera, a jamais, inutile de recommencer.
Le moment est venu de le dire au grand jour: la guerre est truquée… La vérite est affreuse: à chaque guerre, des milliers de combattants revienent sains et saufs.
Or, l’individu qui revient de la guerre a, obligatoirement, plus ou moins l’idée qu’elle n’était pas dangereuse. Cela concourt à l’échec de la suivante et ne fait pas prendre au sérieux les guerres en général. Mais ce ne serait ren. Le combattant qui ne s’est pas fait tuer garde en lui une mentalite de raté; il aura à coeur de compenser cette déficience et contribuera donc à préparer la suivante; or, comment voulez-vous qu’il la prépare bien, puisqu’il s’est tiré de la précédente et que, par conséquent, du point de vue de la guerre, il est disqualifié ?
A chaque guerre, le même phenomène navrant se reproduit : on engage en masse, et des amateurs. Dans les deux camps, on embauche des milliers de manoeuvres non spécialisés, et on les fait instruire par des guerriers professionels âgés ou de grades inférieurs, donc qui ont raté une guerre précédente.
Certes, il est inadmissible qu’un mobilisé ordinaire revienne intact du front; mais, le plus tragique, c’est que des soldats de carrière réchappent de la guerre.
Nous n’avons pas les guerres pour lesquelles nous payons, et je ne suis pas content… Le jour où personne ne reviendra d’une guerre, c’est qu’elle aura été bien faite. Ce jour-là, on s’apercevra que toutes les tentatives avortées jusqu’ici ont été l’oeuvre de farceurs. Ce jour-là, on s’apercevra qu’il suffit d’une guerre pour effacer les préjugés qui s’attachent encore à ce mode de destruction. Ce jour-là, il sera, a jamais, inutile de recommencer.
Contributed by dq82 - 2017/8/2 - 22:44
Language: Italian
Versione italiana dall'album (introvabile) di Beppe Chierici e Daisy Lumini
La cattiva erba (1970)
Autori: Beppe Chierici, Boris Vian
La Cattiva Erba (Contro la guerra e le armi) è un album del 1970 di Beppe Chierici e Daisy Lumini che raccoglie 15 canzoni in italiano frutto di traduzioni e reinterpretazioni di poesie e canzoni che vanno da Archiloco e Lao Tsu ad Antoine attraverso più di 2500 anni di storia. Credo che il titolo piacesse particolarmente a Beppe Chierici, visto che lo ha riutilizzato recentemente per un album su Brassens.
Il tema della guerra, della sua inutilità, del dolore delle madri o delle mogli che attendono il ritorno è ricorrente, essendo alcuni brani molto antichi, non possiamo però attenderci invettive contro la guerra.
Il disco è purtroppo introvabile, se non fosse stato per Flavio Poltronieri che ce ne ha fornito una copia, con tanto di fruscii del vinile inclusi nei brani, perchè in vinile uscì l'LP nel 1970, non saremmo mai riusciti a trovarlo. L'edizione era assai scarna, quindi priva dei testi che abbiamo dovuto pertanto sbobinare all'ascolto. Per quanto riguarda invece i testi originali, alcuni erano già presenti, altri li abbiamo trovati e inseriti.
Adesso l'album è interamente ascoltabile
Perchè quei cannoni? (Antoine) - Nenia (dalla guerra dei trent'anni) - Eravamo tre compagni - Compianto popolare - Il soldato morto in terra straniera - Alla guerra chi ci va - Il soldato dormiente (Rimbaud) - La guerra è truccata (Boris Vian) - Contro la guerra e le armi (Lao Tsu) - Lo scudo perduto (Archiloco) - Non avremo mai la pace, fratello? (Oliver De Magny) - Il condannato a morte - Testamento (Lermontov) - Il malcontento del soldato - Torna da in guerra un soldato
La cattiva erba (1970)
Autori: Beppe Chierici, Boris Vian
La Cattiva Erba (Contro la guerra e le armi) è un album del 1970 di Beppe Chierici e Daisy Lumini che raccoglie 15 canzoni in italiano frutto di traduzioni e reinterpretazioni di poesie e canzoni che vanno da Archiloco e Lao Tsu ad Antoine attraverso più di 2500 anni di storia. Credo che il titolo piacesse particolarmente a Beppe Chierici, visto che lo ha riutilizzato recentemente per un album su Brassens.
Il tema della guerra, della sua inutilità, del dolore delle madri o delle mogli che attendono il ritorno è ricorrente, essendo alcuni brani molto antichi, non possiamo però attenderci invettive contro la guerra.
Il disco è purtroppo introvabile, se non fosse stato per Flavio Poltronieri che ce ne ha fornito una copia, con tanto di fruscii del vinile inclusi nei brani, perchè in vinile uscì l'LP nel 1970, non saremmo mai riusciti a trovarlo. L'edizione era assai scarna, quindi priva dei testi che abbiamo dovuto pertanto sbobinare all'ascolto. Per quanto riguarda invece i testi originali, alcuni erano già presenti, altri li abbiamo trovati e inseriti.
Adesso l'album è interamente ascoltabile
Perchè quei cannoni? (Antoine) - Nenia (dalla guerra dei trent'anni) - Eravamo tre compagni - Compianto popolare - Il soldato morto in terra straniera - Alla guerra chi ci va - Il soldato dormiente (Rimbaud) - La guerra è truccata (Boris Vian) - Contro la guerra e le armi (Lao Tsu) - Lo scudo perduto (Archiloco) - Non avremo mai la pace, fratello? (Oliver De Magny) - Il condannato a morte - Testamento (Lermontov) - Il malcontento del soldato - Torna da in guerra un soldato
LA GUERRA È TRUCCATA
È venuto il momento di dirlo chiaramente: la guerra è truccata.
La verità è tremenda: ad ogni guerra, migliaia di combattenti tornano sani e salvi.
Orbene l'individuo che torna dalla guerra, ha obbligatoriamente, più o meno l'idea che essa non era pericolosa. Tale idea concorre al fallimento della successiva, e non fa prendere sul serio le guerre in generale.
Ma questo è ancora il meno. Il combattente che non si è fatto uccidere serba in sé una mentalità di fallito; si farà quindi un dovere di rimediare a tale manchevolezza e contribuirà a preparare la successiva; ora come volete voi che la prepari bene dal momento che si è salvato dalla precedente e che di conseguenza, dal punto di vista della guerra, non è qualificato?
Ad ogni guerra lo stesso sconfortante fenomeno si ripete: si mobilita in massa e dei dilettanti... dilettanti. Certo è inammissibile che un mobilitato ordinario ritorni intatto dal fronte; ma il più tragico è che dei militari di carriera ritornino dalla guerra! Noi non abbiamo delle guerre per le quali paghiamo? Io non sono contento.
Il giorno in cui più nessuno farà ritorno dalla guerra vorrà dire che finalmente l'avranno fatta bene. Quel giorno ci si accorgerà che tutti quei tentativi finora abortiti erano l'opera di cialtroni. Quel giorno, ci si accorgerà che basta una guerra fatta bene per cancellare i preconcetti che tuttora esistono circa questo modo di distruzione. Quel giorno, sarà per sempre, inutile ricominciare.
È venuto il momento di dirlo chiaramente: la guerra è truccata.
La verità è tremenda: ad ogni guerra, migliaia di combattenti tornano sani e salvi.
Orbene l'individuo che torna dalla guerra, ha obbligatoriamente, più o meno l'idea che essa non era pericolosa. Tale idea concorre al fallimento della successiva, e non fa prendere sul serio le guerre in generale.
Ma questo è ancora il meno. Il combattente che non si è fatto uccidere serba in sé una mentalità di fallito; si farà quindi un dovere di rimediare a tale manchevolezza e contribuirà a preparare la successiva; ora come volete voi che la prepari bene dal momento che si è salvato dalla precedente e che di conseguenza, dal punto di vista della guerra, non è qualificato?
Ad ogni guerra lo stesso sconfortante fenomeno si ripete: si mobilita in massa e dei dilettanti... dilettanti. Certo è inammissibile che un mobilitato ordinario ritorni intatto dal fronte; ma il più tragico è che dei militari di carriera ritornino dalla guerra! Noi non abbiamo delle guerre per le quali paghiamo? Io non sono contento.
Il giorno in cui più nessuno farà ritorno dalla guerra vorrà dire che finalmente l'avranno fatta bene. Quel giorno ci si accorgerà che tutti quei tentativi finora abortiti erano l'opera di cialtroni. Quel giorno, ci si accorgerà che basta una guerra fatta bene per cancellare i preconcetti che tuttora esistono circa questo modo di distruzione. Quel giorno, sarà per sempre, inutile ricominciare.
Contributed by Dq82 - 2017/7/28 - 18:16
Secondo me, visto che ha versioni musicate, questo scritto di Vian andrebbe tolto dagli Extra e restituito alle CCG/AWS DOCG...
La versione di Daisy Lumini e Beppe Chierici è un recitativo, sto cercando di verificare, tramite un contatto con l'interprete stesso, se valga lo stesso per la versione di René Zosso
Dq82
Dq82
B.B. - 2017/8/2 - 23:10
Ho scoperto oggi che René Zosso, uno dei tanti autori che nelle nostre mille peregrinazioni musicali di questo sito ci siamo trovati a contattare, e che gentilmente ci ha risposto, è morto nel luglio 2020
Dq82 - 2023/1/8 - 17:13
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Boris Vian