J’ai ma carte, je suis au parti des petits lapins,
Depuis quarante ans, leur drapeau, c’est le mien :
Carotte rose sur fond de luzerne,
Ça ne fait pas fuir les badernes
Qui me traquent, une carabine à la main.
J’ai ma carte, je suis au parti des petits lapins
Qui finissent à la moutarde, au romarin,
En civet, à la casserole,
Ne croyez pas que ça me console
De ne pas vieillir dans mon champ de thym.
Ma vie,
Qui l’a choisie?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.
J’ai ma carte, je suis au parti des petits enfants
Qui ne veulent pas plus tard devenir grands,
Qui ne veulent pas jouer au facteur ;
Qui ne veulent pas jouer au docteur ;
Ni jouer au papa et à la maman.
J’ai ma carte, je suis au parti des petits enfants
Qui s’ennuient beaucoup au milieu des parents
Mais qui s’envolent sur l’aile
Bien tiède d’une hirondelle
Qui, pour eux, quelquefois fait le printemps.
Ma vie,
Qui l’a choisie ?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.
J’ai ma carte, je suis au parti des pauvres vieux
Entassés dans ces fourrières de banlieue,
À l’hospice, à l’hôpital,
Mourir, c’est le moindre mal
Quand on est loin de chez soi, seul et vieux.
J’ai ma carte, je suis au parti des pépés, mémés
Qui n’ont plus personne à voir ni à aimer,
Même pas un bouquet de violettes,
Un chat de gouttière, une voilette ;
Que leurs souvenirs déjà embaumés.
Ma vie,
Qui l’a choisie?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.
J’ai ma carte, je suis au parti des petites fleurs,
Au parti de tout ce qui souffre et qui meurt,
Loin de leurs jeux olympiques
U.R.S.S. – Amérique,
Loin de leurs cliquetis d’armes vainqueurs.
J’ai ma carte, et je persiste et je signe,
Je suis incurable, je reste dans ma ligne,
Et je garde dans l’oreille,
Juste avant le grand sommeil,
Un violoncelle qui pleure la Mort du cygne.
Ma vie,
Je la choisis,
Je garde les mains vides,
Eux, le fusil !
Depuis quarante ans, leur drapeau, c’est le mien :
Carotte rose sur fond de luzerne,
Ça ne fait pas fuir les badernes
Qui me traquent, une carabine à la main.
J’ai ma carte, je suis au parti des petits lapins
Qui finissent à la moutarde, au romarin,
En civet, à la casserole,
Ne croyez pas que ça me console
De ne pas vieillir dans mon champ de thym.
Ma vie,
Qui l’a choisie?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.
J’ai ma carte, je suis au parti des petits enfants
Qui ne veulent pas plus tard devenir grands,
Qui ne veulent pas jouer au facteur ;
Qui ne veulent pas jouer au docteur ;
Ni jouer au papa et à la maman.
J’ai ma carte, je suis au parti des petits enfants
Qui s’ennuient beaucoup au milieu des parents
Mais qui s’envolent sur l’aile
Bien tiède d’une hirondelle
Qui, pour eux, quelquefois fait le printemps.
Ma vie,
Qui l’a choisie ?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.
J’ai ma carte, je suis au parti des pauvres vieux
Entassés dans ces fourrières de banlieue,
À l’hospice, à l’hôpital,
Mourir, c’est le moindre mal
Quand on est loin de chez soi, seul et vieux.
J’ai ma carte, je suis au parti des pépés, mémés
Qui n’ont plus personne à voir ni à aimer,
Même pas un bouquet de violettes,
Un chat de gouttière, une voilette ;
Que leurs souvenirs déjà embaumés.
Ma vie,
Qui l’a choisie?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.
J’ai ma carte, je suis au parti des petites fleurs,
Au parti de tout ce qui souffre et qui meurt,
Loin de leurs jeux olympiques
U.R.S.S. – Amérique,
Loin de leurs cliquetis d’armes vainqueurs.
J’ai ma carte, et je persiste et je signe,
Je suis incurable, je reste dans ma ligne,
Et je garde dans l’oreille,
Juste avant le grand sommeil,
Un violoncelle qui pleure la Mort du cygne.
Ma vie,
Je la choisis,
Je garde les mains vides,
Eux, le fusil !
Contributed by Marco Valdo M.I. - 2016/7/31 - 15:16
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Lucien l’âne mon ami, si je pensais un instant que tu ne connaissais pas Henri Tachan, je me lancerais illico dans une longue histoire à propos de ce chanteur que je connais depuis longtemps. Mais voilà, je sais que tu le connais et qu’il n’est pas nécessaire de te tresser une biographie. Cependant, il me paraît utile de dire deux trois choses à propos de cette chanson. Sans doute, Henri Tachan devait avoir dans l’oreille ou dans un coin perdu de sa mémoire, le souvenir d’une chanson de Pierre Dac et Francis Blanche qui portait un titre fort proche de celui-ci : Le Parti d’en rire et qui abordait l’univers politique avec une forte dose d’acide ironique. Tachan est lui aussi sceptique que ces deux-là et que par exemple, Georges Brassens. Cela dit, à lire son titre, on dirait une chanson enfantine ou une chanson pour enfants – et elle l’est assurément.
Et pourquoi pas ?, demande Lucien l’âne. Pourquoi ne le serait-elle pas ? C’est très bien de faire des chansons pour les petits enfants.
De fait. Note, Lucien l’âne mon ami, et la chose te plaira que le même Henri Tachan avait fait une chanson sur La Chasse, que je trouve pas piquée des hannetons et qui prenait le parti des animaux face aux bourreaux en mal de loisirs actifs. Ici aussi, il prend le parti des animaux – et m’est avis que s’il avait connu la Déclaration Universelle des Droits de l’Âne, il l’aurait adoptée. D’ailleurs, quand on la lit, on a bien envie d’être comme toi, un âne.
Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, voilà qui fait plaisir. Malheureusement, ce n’est donné à tout le monde d’être un âne et le devenir est très difficile et comme je le sais d’expérience, fort périlleux. Mais je suppose qu’il ne dit pas que ça dans sa chanson.
Il s’annonce également comme rallié au parti des lapins, des enfants, des vieux, des fleurs et définitivement incurablement hors système. En somme, Henri Tachan est un « en dehors », un « à l’écart » des chemins trop fréquentés, un qui – tiens, comme Brassens, encore lui – ne suit pas le droit chemin. Tachan – comme le lapin – se perd volontiers dans la luzerne.
Comme tu le sais certainement, c’est aussi une habitude des ânes, que de baguenauder et d’aller se perdre dans des endroits eux-mêmes perdus. Mais rassure-toi, Marco Valdo M.I mon ami, on s’y retrouve fort bien. Alors, écoutons la chanson et puis reprenons notre tache et tissons (dans la luzerne ou à l’orée du village ou carrément dans le bois où l’on évitera soigneusement de déranger les papillons) le linceul de ce vieux monde chasseur, tueur, sacrificiel, religieux et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane