Wenn Millionen arbeiten, ohne zu leben,
wenn Mütter den Kindern nur Milchwasser geben –
das ist Ordnung.
Wenn Werkleute rufen: «Laßt uns ans Licht!
Wer Arbeit stiehlt, der muß vors Gericht!»
Das ist Unordnung.
Wenn Tuberkulöse zur Drehbank rennen,
wenn dreizehn in einer Stube pennen –
das ist Ordnung.
Wenn einer ausbricht mit Gebrüll,
weil er sein Alter sichern will –
das ist Unordnung.
Wenn reiche Erben im schweizer Schnee
jubeln – und sommers am Comer See –
dann herrscht Ruhe.
Wenn Gefahr besteht, daß sich Dinge wandeln,
wenn verboten wird, mit dem Boden zu handeln –
dann herrscht Unordnung.
Die Hauptsache ist: Nicht auf Hungernde hören.
Die Hauptsache ist: Nicht das Straßenbild stören.
Nur nicht schrein.
Mit der Zeit wird das schon.
Alles bringt euch die Evolution.
So hats euer Volksvertreter entdeckt.
Seid ihr bis dahin alle verreckt?
So wird man auf euern Gräbern doch lesen:
sie sind immer ruhig und ordentlich gewesen.
wenn Mütter den Kindern nur Milchwasser geben –
das ist Ordnung.
Wenn Werkleute rufen: «Laßt uns ans Licht!
Wer Arbeit stiehlt, der muß vors Gericht!»
Das ist Unordnung.
Wenn Tuberkulöse zur Drehbank rennen,
wenn dreizehn in einer Stube pennen –
das ist Ordnung.
Wenn einer ausbricht mit Gebrüll,
weil er sein Alter sichern will –
das ist Unordnung.
Wenn reiche Erben im schweizer Schnee
jubeln – und sommers am Comer See –
dann herrscht Ruhe.
Wenn Gefahr besteht, daß sich Dinge wandeln,
wenn verboten wird, mit dem Boden zu handeln –
dann herrscht Unordnung.
Die Hauptsache ist: Nicht auf Hungernde hören.
Die Hauptsache ist: Nicht das Straßenbild stören.
Nur nicht schrein.
Mit der Zeit wird das schon.
Alles bringt euch die Evolution.
So hats euer Volksvertreter entdeckt.
Seid ihr bis dahin alle verreckt?
So wird man auf euern Gräbern doch lesen:
sie sind immer ruhig und ordentlich gewesen.
Contributed by Bernart Bartleby - 2015/3/2 - 11:35
Language: French
Version française – Calme et Ordre – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson allemande – Ruhe und Ordnung – Kurt Tucolsky – 1925
Loi et Ordre, un binôme souvent invoqué, à droite comme à gauche, surtout dans les moments de crise et de transformation. Puisque cependant en général personne ne rêve de les conjuguer avec Justice, voilà qu'il se révèle invariablement toujours pour ce qu'il est : Fascisme et Répression.
À propos d'Ernst Ottwalt, nom de plume d'Ernst Gottwalt Nicolas : Allemand, né en 1901, écrivain, communiste… La date de sa mort – août 1943 – pourrait nous faire penser que soit mort dans quelque camp de concentration nazi… Il n'en est pas ainsi : en 1933 Ottwalt et femme fuirent en Union soviétique ; en 1936, ils furent arrêtés par le NKVD, la police de Staline, et furent internés dans un goulag sibérien ; elle fut renvoyée dans son pays en 1941 (ne sait pas comment elle put survivre, d'abord et après) et seulement en 1958, elle sut que son mari était mort en 1943 quand il était encore prisonnier…
……………….
Vois-tu, Lucien l'âne mon ami, je soupçonne un peu notre cher Tucholsky d'avoir – volens, nolens – écrit ici un poème à la Baudelaire, mais comment dire, à l'envers, ou plus exactement, en termes de photographie, en négatif.
Mais que vient faire ici, Charles Baudelaire ? Demande Lucien l'âne un peu estomaqué. Au moment où Tucholsky écrit de poème, cette chanson (deux termes équivalents, pour autant que le texte auquel ils renvoient en vaillent la peine), Baudelaire est mort depuis soixante ans, plus d'un demi-siècle.
En effet, Lucien l'âne mon ami, et comme bien tu l'imagines, je le sais. Cependant, je persiste dans mon idée et je la précise. Tout m'est venu au moment de traduire le titre : « Ruhe und Ordnung ». J'ai d'abord songé à « Repos et Ordre », mais en vérité, ce n'est pas cela, me disais-je. Le commentateur italien, lui a pensé « Loi et Ordre ». C'est un des sens et il est certainement présent à l'esprit de Theobald Tiger quand il l'écrit. Mais, après avoir ruminé la chose quelques jours – si, si, pour certaines des versions, il me faut ruminer la chose, la laisser transiter entre mille événements quotidiens, lui faire passer une nuit ou deux, bref, j'en suis venu tout doucettement à une musique que je nomme la « musique mentale », celle qui envahit toute la tête et s'impose avec l'obstination d'un thème de Boléro vu par Ravel. Et cette musique était une musique de mots : « Luxe, calme et volupté », directement venue de l'Invitation au Voyage de Baudelaire, que j'aimerais présenter ici comme une des ces formidables chansons contre la guerre, autrement dit comme une chanson de paix. Comme une chanson qui indique très exactement où voulait aller le Brave Soldat Chveik ou le Déserteur lui-même. Et ce n'est pas Tucholsky, Erich Maria Remarque, Chevallier, Léo Ferré et pourquoi pas, Riccardo Venturi, qui s'en plaindraient…
En somme, si je comprends bien, ce serait là la description d'un monde qui s'interdirait l'invitation au voyage… bref, ce serait la description du monde de la Guerre de Cent Mille Ans La Guerre de Cent mille ans où les riches et les puissants pour nourrir leur boulimie, leur avidité, leurs grossiers appétits font une guerre de rapine contre les pauvres. Et bien, il ne te reste plus qu'à le faire et insérer ici cette chanson baudelairienne et tisser ainsi le linceul de ce vieux monde sclérosé, mentalement rigide, polémophile et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Chanson allemande – Ruhe und Ordnung – Kurt Tucolsky – 1925
Loi et Ordre, un binôme souvent invoqué, à droite comme à gauche, surtout dans les moments de crise et de transformation. Puisque cependant en général personne ne rêve de les conjuguer avec Justice, voilà qu'il se révèle invariablement toujours pour ce qu'il est : Fascisme et Répression.
À propos d'Ernst Ottwalt, nom de plume d'Ernst Gottwalt Nicolas : Allemand, né en 1901, écrivain, communiste… La date de sa mort – août 1943 – pourrait nous faire penser que soit mort dans quelque camp de concentration nazi… Il n'en est pas ainsi : en 1933 Ottwalt et femme fuirent en Union soviétique ; en 1936, ils furent arrêtés par le NKVD, la police de Staline, et furent internés dans un goulag sibérien ; elle fut renvoyée dans son pays en 1941 (ne sait pas comment elle put survivre, d'abord et après) et seulement en 1958, elle sut que son mari était mort en 1943 quand il était encore prisonnier…
……………….
Vois-tu, Lucien l'âne mon ami, je soupçonne un peu notre cher Tucholsky d'avoir – volens, nolens – écrit ici un poème à la Baudelaire, mais comment dire, à l'envers, ou plus exactement, en termes de photographie, en négatif.
Mais que vient faire ici, Charles Baudelaire ? Demande Lucien l'âne un peu estomaqué. Au moment où Tucholsky écrit de poème, cette chanson (deux termes équivalents, pour autant que le texte auquel ils renvoient en vaillent la peine), Baudelaire est mort depuis soixante ans, plus d'un demi-siècle.
En effet, Lucien l'âne mon ami, et comme bien tu l'imagines, je le sais. Cependant, je persiste dans mon idée et je la précise. Tout m'est venu au moment de traduire le titre : « Ruhe und Ordnung ». J'ai d'abord songé à « Repos et Ordre », mais en vérité, ce n'est pas cela, me disais-je. Le commentateur italien, lui a pensé « Loi et Ordre ». C'est un des sens et il est certainement présent à l'esprit de Theobald Tiger quand il l'écrit. Mais, après avoir ruminé la chose quelques jours – si, si, pour certaines des versions, il me faut ruminer la chose, la laisser transiter entre mille événements quotidiens, lui faire passer une nuit ou deux, bref, j'en suis venu tout doucettement à une musique que je nomme la « musique mentale », celle qui envahit toute la tête et s'impose avec l'obstination d'un thème de Boléro vu par Ravel. Et cette musique était une musique de mots : « Luxe, calme et volupté », directement venue de l'Invitation au Voyage de Baudelaire, que j'aimerais présenter ici comme une des ces formidables chansons contre la guerre, autrement dit comme une chanson de paix. Comme une chanson qui indique très exactement où voulait aller le Brave Soldat Chveik ou le Déserteur lui-même. Et ce n'est pas Tucholsky, Erich Maria Remarque, Chevallier, Léo Ferré et pourquoi pas, Riccardo Venturi, qui s'en plaindraient…
En somme, si je comprends bien, ce serait là la description d'un monde qui s'interdirait l'invitation au voyage… bref, ce serait la description du monde de la Guerre de Cent Mille Ans La Guerre de Cent mille ans où les riches et les puissants pour nourrir leur boulimie, leur avidité, leurs grossiers appétits font une guerre de rapine contre les pauvres. Et bien, il ne te reste plus qu'à le faire et insérer ici cette chanson baudelairienne et tisser ainsi le linceul de ce vieux monde sclérosé, mentalement rigide, polémophile et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
CALME ET ORDRE
Quand des millions travaillent, sans vivre,
Quand des mères ne donnent aux enfants du lait coupé
C’est l'ordre.
Quand des travailleurs réclament : « Faisons la lumière !
Celui qui vole le travail doit être traduit devant la justice ! »
C'est le désordre.
Quand des tuberculeux courent à la tour,
Quand on dort à treize dans une pièce
C'est l'ordre.
Quand quelqu'un manifeste en hurlant,
Car il veut assurer sa vieillesse –
C'est le désordre.
Quand de riches héritiers dans la neige suisse
Jubilent – et l'été, au lac de Côme –
Alors, le calme règne.
Quand le danger existe que les choses changent,
Quand on interdit de commercer avec la terre–
Alors, règne le désordre.
Le plus important est : ne rien entendre des affamés
Le plus important est : Ne pas troubler l'ambiance de la rue.
Surtout ne pas crier.
Avec le temps, cela viendra.
Tout vous apporte l'évolution.
Ainsi, vous avez découvert votre représentant du peuple.
D'ici là, vous serez tous crevés ?
Ainsi, on pourra lire sur vos tombes :
Ils ont toujours été calmes et disciplinés.
Quand des millions travaillent, sans vivre,
Quand des mères ne donnent aux enfants du lait coupé
C’est l'ordre.
Quand des travailleurs réclament : « Faisons la lumière !
Celui qui vole le travail doit être traduit devant la justice ! »
C'est le désordre.
Quand des tuberculeux courent à la tour,
Quand on dort à treize dans une pièce
C'est l'ordre.
Quand quelqu'un manifeste en hurlant,
Car il veut assurer sa vieillesse –
C'est le désordre.
Quand de riches héritiers dans la neige suisse
Jubilent – et l'été, au lac de Côme –
Alors, le calme règne.
Quand le danger existe que les choses changent,
Quand on interdit de commercer avec la terre–
Alors, règne le désordre.
Le plus important est : ne rien entendre des affamés
Le plus important est : Ne pas troubler l'ambiance de la rue.
Surtout ne pas crier.
Avec le temps, cela viendra.
Tout vous apporte l'évolution.
Ainsi, vous avez découvert votre représentant du peuple.
D'ici là, vous serez tous crevés ?
Ainsi, on pourra lire sur vos tombes :
Ils ont toujours été calmes et disciplinés.
Contributed by Marco Valdo M.I. - 2015/3/24 - 11:09
Language: Italian
Traduzione italiana di Elisa Ranucci da “Kurt Tucholsky. Prose e poesie”, Guanda, 1977
CALMA E ORDINE
Quando milioni lavorano, senza poter vivere,
quando le madri ai figli danno latte annacquato,
questo è ordine.
Quando « Fateci luce! » gridano gli operai
« Sia processato chi ci ruba lavoro! »
questo è disordine.
Quando tubercolosi corrono al tornio,
quando dormono in una stanza in tredici,
questo è ordine.
Quando c’è uno che si mette a urlare
perché vuole una vecchiaia assicurata,
questo è disordine.
Quando ricchi eredi sulla neve svizzera
fan festa — e sul lago di Como d’estate —
regna allora la calma.
Quando c’è rischio che le cose cambino,
quando è proibita la speculazione,
regna allora il disordine.
L’importante è non udire gli affamati.
L’importante è non sconvolgere le strade.
Non gridare.
Verrà col tempo.
Tutto porterà a voi l’evoluzione.
E’ una scoperta del vostro deputato.
Per quell’epoca sarete tutti morti?
Ma sulle vostre tombe leggeranno:
Furono amanti dell’ordine e tranquilli.
Quando milioni lavorano, senza poter vivere,
quando le madri ai figli danno latte annacquato,
questo è ordine.
Quando « Fateci luce! » gridano gli operai
« Sia processato chi ci ruba lavoro! »
questo è disordine.
Quando tubercolosi corrono al tornio,
quando dormono in una stanza in tredici,
questo è ordine.
Quando c’è uno che si mette a urlare
perché vuole una vecchiaia assicurata,
questo è disordine.
Quando ricchi eredi sulla neve svizzera
fan festa — e sul lago di Como d’estate —
regna allora la calma.
Quando c’è rischio che le cose cambino,
quando è proibita la speculazione,
regna allora il disordine.
L’importante è non udire gli affamati.
L’importante è non sconvolgere le strade.
Non gridare.
Verrà col tempo.
Tutto porterà a voi l’evoluzione.
E’ una scoperta del vostro deputato.
Per quell’epoca sarete tutti morti?
Ma sulle vostre tombe leggeranno:
Furono amanti dell’ordine e tranquilli.
Contributed by Bernart Bartleby - 2016/11/7 - 17:43
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Note for non-Italian users: Sorry, though the interface of this website is translated into English, most commentaries and biographies are in Italian and/or in other languages like French, German, Spanish, Russian etc.
Versi di Kurt Tucholsky, pubblicato con lo pseudonimo di Theobald Tiger su “Die Weltbühne” del 13 gennaio 1925. Poi nell’antologia di scritti e poesie intitolata “Das Lächeln der Mona Lisa” pubblicata nel 1929.
Musica di Hanns Eisler, composta nel 1959
In “Lieder nach Texten von Kurt Tucholsky für singstimme und klavier”
Poi anche nel disco di Claus Boysen e Rainer Abraham intitolato “Tucholsky Und Genossen”
Legge e Ordine, un binomio spesso invocato, a destra come a sinistra, specie nei momenti di crisi e di trasformazione. Siccome però in genere nessuno si sogna di coniugarlo con Giustizia, ecco che puntualmente si rivela sempre per quel che è: Fascismo e Repressione.
A proposito di Ernst Ottwalt, nome di penna di Ernst Gottwalt Nicolas: tedesco, nato nel 1901, scrittore, comunista… La data di morte – agosto 1943 – potrebbe farci pensare che sia morto in qualche campo di concentramento nazista... Non è così: nel 1933 Ottwalt e la moglie fuggirono in Unione Sovietica; nel 1936 furono arrestati dalla NKVD, la polizia di Stalin, e furono internati in un gulag siberiano; lei venne rimpatriata nel 1941 (non so come potè sopravvivere, prima e dopo) e solo nel 1958 seppe che il marito era morto nel 1943 mentre era ancora prigioniero…