Il tutto è falso

Ils écrivaient tellement tout ensemble, Giorgio Gaber et Sandro Luporini, qu'à la fin, on ne les distinguait plus; sur la photo ci-dessus, dites moi un peu, si vous y arrivez, qui des deux est Gaber et qui est Luporini vu qu'ils ne sont pas debout (Sandro Luporini, jeune était dans l'équipe nationale italienne de basket, il mesure presque deux mètres). Une chanson extraordinairement belle, et à considérer avec beaucoup de soin. Écrite peu avant la mort de Gaber et publiée dans l'album posthume « Je ne me sens pas italien », c'est à mon avis une des choses des plus destructives écrites en langue italienne ; quelque chose qui ne semble pas laisser le moindre espoir. Pour ceci, par certains, elle a été vue comme un insupportable hymne au nihilisme le plus total. Parallèlement, dire que tout ce que le monde offre est faux (toutes les institutions et les idéologies créées par l'homme, le système consumériste et développé), pour d'autres, il s'agit dès lors d'une chanson qui crie le besoin de vérité. Ainsi pour certains, Gaber, en vue de la mort, a viré au pessimisme le plus sombre, pour d'autres (par exemple le soussigné), il s'est orienté par contre vers l'Anarchie, pour laquelle ce qui apparaît comme pessimisme est en réalité une bien précise prise de conscience. Mais cela reste une chanson ardue, à prendre toujours avec des pincettes. Elle nous oblige de toute façon à fouiller dans notre conscience, par exemple en mettant littéralement à des claques nos engagements ou notre « militance » (est-ce que tout ce envers quoi nous affichons notre « participation » nous importe réellement ? Une question que depuis des années et années, du moins en ce qui me concerne, je cherche à me poser constamment dans la rédaction de ce site). Sous-jacente, sans doute, ma vision d'ensemble personnelle; je n'ai jamais supporté, la retenant la chose plus fausse dans l'absolu, la soi-disant « vérité » (et je ne me réfère pas seulement à celle « révélée » des sottises religieuses), et moins encore ses paladins avec leurs bûchers. J'ai constamment envie de tirer lorsque j'entends débiter des niaiseries telle que la « vérité est révolutionnaire », car les rares, authentiques révolutions qui se sont accomplies dans l'Histoire proviennent de constructions strictement oniriques, de mirages de vent, d'utopies qui se moquent de la « vérité » et, qu'il me soit permis de le dire, même de la réalité.

Et je crois que c'est là la substance de cette chanson dure comme un roc : sans le faux , rien n'existe. Le faux est tout car il s'oppose à un « vrai » dont l'unique substance est l'oppression (on voit la terrible partie sur les « valeurs perdues » qui créent, en réalité, un désespoir renouvelé). Il est clair que je ne recommanderais jamais cette chanson, que j'ai écouté presque quotidiennement dans ce bizarre mois d'août, à qui n'a pas entrepris la mauvaise voie du doute ; laquelle, en plus que mauvaise, a le vice de mener souvent nulle part. Et aussi celui de révéler des choses intolérables, comme par exemple, un éclair de vérité authentique. Authentique car, finalement, immédiate. [RV]

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En vérité, je vous le dis : Venturi est plus difficile à traduire que Gaber. Juste une petite remarque, cependant … D'une certaine manière, Gaber est un frère de l'Homme de la Mancha. Souviens-toi :



et Gaber :



Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, on dirait bien que Gaber pense un peu comme nous et s'il était encore là, il nous aiderait à tisser le linceul de ce vieux monde truqué, maquillé, trompeur, faux, sournois, rusé, strano, assurdo et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane