Un ordre de Mamie, sans détour
Immédiatement, train pour Hambourg
Croix de bois, croix de fer
Si tu meurs, tu vas en enfer
Du squat de Kreuzberg, j'étais parti bien matinal
Pour le dernier voyage du grand amiral
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Ils sont venus, les survivants
Les sous-mariniers d'antan
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
On était deux cents à l'enterrement
De Dönitz à se geler dans le vent
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Croix de fer au cou, casquette sur la tête
Sans manteau, comme face à la tempête
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Les rescapés dans le froid de canard
Portaient le cercueil drapé rouge, jaune et noir
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Et tous chantaient, nostalgie et mémoire
L' « Über alles » et le Kamerad, leurs vieux chants de gloire
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
J'étais là. Mamie m'avait obligé
Pour oncle Konrad et oncle Karl qui n'étaient jamais remontés
Croix de bois, croix de fer
Dans les trois cent mille sous la mer
En rentrant, les flics avaient tout dégagé
À la matraque. On va se reloger dans le quartier.
Croix de bois, croix de fer
Nous, on ne se laisse pas faire.
Immédiatement, train pour Hambourg
Croix de bois, croix de fer
Si tu meurs, tu vas en enfer
Du squat de Kreuzberg, j'étais parti bien matinal
Pour le dernier voyage du grand amiral
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Ils sont venus, les survivants
Les sous-mariniers d'antan
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
On était deux cents à l'enterrement
De Dönitz à se geler dans le vent
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Croix de fer au cou, casquette sur la tête
Sans manteau, comme face à la tempête
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Les rescapés dans le froid de canard
Portaient le cercueil drapé rouge, jaune et noir
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
Et tous chantaient, nostalgie et mémoire
L' « Über alles » et le Kamerad, leurs vieux chants de gloire
Croix de bois, croix de fer
Moins les trois cent mille sous la mer
J'étais là. Mamie m'avait obligé
Pour oncle Konrad et oncle Karl qui n'étaient jamais remontés
Croix de bois, croix de fer
Dans les trois cent mille sous la mer
En rentrant, les flics avaient tout dégagé
À la matraque. On va se reloger dans le quartier.
Croix de bois, croix de fer
Nous, on ne se laisse pas faire.
envoyé par Marco Valdo M.I. - 7/10/2012 - 00:45
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Canzone française – Croix de Bois, Croix de Fer – Marco Valdo M.I. – 2012
Histoires d'Allemagne 80
An de Grass 81
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
Enfin, Lucien l'âne mon ami aux oreilles splendides, tu sais aussi bien que moi que dans notre langue française, il existe une antienne enfantine de chez nous qui dit : « Croix de bois, croix de fer, si je mens je vais en enfer ! ». Une antienne qui est serinée aux enfants depuis que les catholiques ont inventé l'enfer et la punition comme mode de régulation de la société. Pour les croix de bois, il suffit d'aller voir les cimetières militaires ou de relire Roland Dorgelès. Pour les croix de fer, c'est une décoration militaire allemande... Oh, elle date du premier Reich et même, du royaume de Prusse... On ne l'a pas abandonnée depuis... Toujours la même distinction... Imagine ce que ça signifie... Remarque au passage qu'elle est devenue le symbole de l'actuelle armée allemande.... Peut-être n'y a-t-il là rien d'inquiétant...
J'aimerais le croire, dit Lucien l'âne en raidissant l'échine. Mais, je n'en suis pas si certain...
Moi, non plus ! Comme disait Voltaire à propos de l'Église catholique : « La caque sent toujours le hareng ! » Par ailleurs, pour en revenir à notre canzone, c'est toujours complexe ces histoires d'Allemagne ; ce qui fait qu'il faut presque toujours les expliquer... Au moins un peu. Cela dit, ce sont des canzones et on ne peut exiger d'elles plus qu'elles ne peuvent donner... Le genre a ses limites... Il réclame l'indulgence de l'interlocuteur, tout autant qu'une certaine dose d'intelligence de la part de ce dernier. Cependant, tu as raison, on ne peut lui refuser quelques indications... Ainsi, l'histoire est contée par un narrateur dans une lettre qu'il envoie à son amie, laquelle se prénomme Rosi. Le narrateur est un jeune Berlinois qui squatte (avec foule d'autres) dans le quartier du Kreuzberg.
Jusque là, dit Lucien l'âne, j'ai suivi.
Donc, notre jeune homme – dont on ne connaîtra jamais le nom, ni le prénom... explique son brusque départ par un télégramme de sa grand-mère paternelle, dite Mamie, une dame assez autoritaire. Comme il l'explique : avec Mamie, on ne discute pas ; on exécute. Et Mamie en mémoire de ses deux fils Karl et Konrad, morts sous la mer, lui intime l'ordre d'assister avec elle à l'enterrement d'un nazi de haut rang, l'amiral Dönitz, dit le grand amiral. C'est au cimetière de Hambourg, autour du cercueil du « héros des océans » que ce jeune Allemand va découvrir un tas de Croix de fer... Ce sont les survivants du grand massacre sous-marin – il y avait quand même eu trois cent mille cadavres dans ces cercueils flottants de la Kriegsmarine. Il va donc les découvrir et les entendre chanter, les survivants – accompagnés par de jeunes clampins en culottes courtes, avec uniformes et tambours...
La nouvelle vague ?, demande Lucien l'âne...
Sans doute. Le terme est bien choisi... Je me demande même, s'il ne faut pas voir dans cette Mamie quelque peu dictatoriale l'incarnation de la continuité de l'Allemagne... convoquant son petit-fils pour qu'il prenne la relève... D'ailleurs, dans la lettre que ce dernier envoie à son amie, on apprend que cette grand-mère de fer lui suggère de venir habiter chez elle avec Rosi – la destinatrice du courrier. Mais là, c'est pure interprétation...
Peut-être, peut-être...
.
Peut-être, en effet, Lucien l’âne mon ami. Peut-être est-ce pourtant bien l'Allemagne de cette année 1981 qui invite le jeune homme (c'est-à-dire la jeunesse allemande) à revenir à la bonne tradition. Dès lors,la question est de savoir de quelle tradition, il s'agit. Et là, j'ai une certaine idée de la chose...
Tu n'as peut-être pas tort... dit l'âne Lucien en marquant sa réflexion d'un raclement de sabot.
Je pense même qu'il faut voir les choses plus profondément. Car, qui est donc ce « grand amiral », si ce n'est le successeur désigné de Hitler et le Président du Quatrième Reich ; celui-là même qui aurait voulu sauver le régime nazi au travers d'une paix négociée avec les Alliés occidentaux afin de poursuivre le grand rêve bismarckien... En somme, c'est le continuateur... C'est bien lui qu'on enterre là, c'est bien lui qui est dans un cercueil, couché sous le drapeau noir-jaune-rouge de la République fédérale, avec sa haie d'honneur – bras levés et tendus des survivants à la croix de fer et le « Deutschland über alles... ». Dès lors, la Mamie serait donc bien la vieille Allemagne, nostalgique des Reichs engloutis et passant le flambeau aux jeunes...
On en voit d'ailleurs les effets à présent..., dit Lucien l'âne. Cette Allemagne-là s'est perpétuée et tend à prendre le contrôle de l’Europe, à la confondre avec la réalisation de sa propre ambition. On voit bien ce qu'il va en être du rêve d'Otto quand on regarde ce qui se passe à Athènes... Über alles in Europa... REGARDEZ CE QU'ILS FONT AUX GRECS, ILS VOUS LE FERONT DEMAIN. On y ajoutera bientôt les Espagnols et sans doute après, les Italiens et puis, tous les autres. Quant à la progression vers l'Est... Elle est déjà bien entamée. Ceci aussi est un épisode de la Guerre de Cent Mille Ans et une raison de plus de nous atteler à notre tissage du linceul de ce vieux monde nauséabond, nostalgique, impérialiste et cacochyme. (Heureusement !)
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.