Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Je mesure aujourd'hui, combien favorisé
J'étais quand je travaillais chez Petit Louis
À Billancourt-sur-Seine, dans l'entrepôt modèle
Je participais à l'expansion
À six heures du matin
Levé comme un aveugle
Se laver, avaler son café
S'enfoncer dans le noir, prendre le bus d'assaut
Piétiner dans le métro, c'était le pied
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
S'engouffrer au vestiaire, cavaler pour pointer
Enlever sa casquette devant le chef
Faire tourner la machine, baigner toute la journée
Dans l'huile polluée, quelle santé
Surtout ne pas parler
Mais ne pas trop rêver
C'est comme ça que les accidents arrivent
Et puis le soir venu, repartir dans l'autre sens
Pour le même enthousiasmant voyage
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Heureusement un jour, sur le Pont de Sèvres-Montreuil
Dans le bain de vapeur quotidien
Dans la demi-conscience, au hasard d'un chaos
J'ai senti dans mon dos tes deux seins
Je me suis retourné
Je t'ai bien regardée
Et j'ai mis mes deux mains sur tes seins
Tu m'as bien regardé et tu n'a pas bronché
Bien mieux tu as souri et j'ai dit:
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Tu t'appelais Ernestine ou peut-être Honorine
Mais moi je préfère Anastasie
On a été chez moi, ça a duré des mois
J'ai oublié d'aller chez Petit Louis
Qu'est-ce qu'on peut voyager
Dans une petite carrée
Tu m'as emmené partout où c'est bon
Et puis un jour comme ça pour éviter l'ennui
On a décidé de se séparer
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
La morale de ce tango tout-à-fait utopique
Mais c'est pas interdit de rêver
C'est que si tous les prolos au lieu d'aller pointer
Décidaient un jour de s'arrêter
Pour aller prendre leur pied où que ça leur plairait
Ça serait bien moins polluant que l'ennui
Il n'y aurait plus de gars comme moi
Comme j'étais autrefois
Qui se répéteraient tout le temps pour tuer le temps
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Je mesure aujourd'hui, combien favorisé
J'étais quand je travaillais chez Petit Louis
À Billancourt-sur-Seine, dans l'entrepôt modèle
Je participais à l'expansion
À six heures du matin
Levé comme un aveugle
Se laver, avaler son café
S'enfoncer dans le noir, prendre le bus d'assaut
Piétiner dans le métro, c'était le pied
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
S'engouffrer au vestiaire, cavaler pour pointer
Enlever sa casquette devant le chef
Faire tourner la machine, baigner toute la journée
Dans l'huile polluée, quelle santé
Surtout ne pas parler
Mais ne pas trop rêver
C'est comme ça que les accidents arrivent
Et puis le soir venu, repartir dans l'autre sens
Pour le même enthousiasmant voyage
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Heureusement un jour, sur le Pont de Sèvres-Montreuil
Dans le bain de vapeur quotidien
Dans la demi-conscience, au hasard d'un chaos
J'ai senti dans mon dos tes deux seins
Je me suis retourné
Je t'ai bien regardée
Et j'ai mis mes deux mains sur tes seins
Tu m'as bien regardé et tu n'a pas bronché
Bien mieux tu as souri et j'ai dit:
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Tu t'appelais Ernestine ou peut-être Honorine
Mais moi je préfère Anastasie
On a été chez moi, ça a duré des mois
J'ai oublié d'aller chez Petit Louis
Qu'est-ce qu'on peut voyager
Dans une petite carrée
Tu m'as emmené partout où c'est bon
Et puis un jour comme ça pour éviter l'ennui
On a décidé de se séparer
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
La morale de ce tango tout-à-fait utopique
Mais c'est pas interdit de rêver
C'est que si tous les prolos au lieu d'aller pointer
Décidaient un jour de s'arrêter
Pour aller prendre leur pied où que ça leur plairait
Ça serait bien moins polluant que l'ennui
Il n'y aurait plus de gars comme moi
Comme j'étais autrefois
Qui se répéteraient tout le temps pour tuer le temps
Anastasie, l'ennui m'anesthésie
Contributed by Marco Valdo M.I. - 2012/8/6 - 17:10
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Oh, mais je le connais ce tango, c'est aussi une formidable histoire d'amour entre François et Anastasie... Et j'ai moi aussi, une tendresse au cœur pour Béranger. Alors, c'est sûr qu'on va en reparler de François Béranger... Au moins ici, dans les Chansons contre la Guerre.
Deux mots de commentaires quand même... Voici un tango révolutionnaire sans prise du Palais d'Hiver et sans landau perdu dans un escalier. Un tango vraiment révolutionnaire qui attaque le mal à la racine, qui attaque le travail dans on effet le plus pervers : l'ennui. Le travail distille l'ennui tout au long de la vie sous quelque régime que ce soit : avant, pendant et après le sacro-saint travail. Ainsi, on aurait pu penser que chez Petit Louis (à la régie), entreprise nationalisée, on éviterait les cadences, les boulots idiots, on développerait un travail intelligent... Mais comme tu vois, il n'en a rien été et ce n'est d'ailleurs toujours pas le cas. Dès lors, on parle bien évidemment de ce travail d'esclave, de ce service de travail obligatoire (gestes répétitifs, tâches barbantes... ; temps de vie contre heures mortes) qu'instaure actuellement l'Europe (par exemple) quand elle fait la chasse aux chômeurs. Bientôt, d'ailleurs, le chômeur sera considéré « a priori » comme un terroriste et soumis à toutes sortes de contrôles. Ergo, on ne parle pas de ce que fait l'artiste ou le jardinier amateur... Ou de toute activité tant soit peu créatrice et libre. Et à ce propos, il doit bien y avoir des Honorine ou des Ernestine un peu partout dans le monde... Et cette morale réjouissante : « Si tous les prolos décidaient un jour … de s'arrêter (comprendre : d'arrêter de travailler...) pour aller prendre leur pied... ».
Voilà un programme bien plus réjouissant que celui de Monsieur Ford ou d'Alekseï Grigorievitch Stakhanov (en russe : Алексей Григорьевич Стаханов ; 1905-1977), dit Lucien l'âne en riant de toutes ses blanches dents. Et je suis assez partant pour Honorine ou Ernestine et même, l'Anastasie à la manière de Béranger. Remarque qu'il a su faire une chanson prolétarienne et sensuelle... Dès lors, reprenons notre œuvre et tissons le linceul de ce vieux monde fauteur d'ennui, pénible, lourd, triste et cacochyme. ( Heureusement !)
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane