Lingua   

Les Illusions perdues

Marco Valdo M.I.
Lingua: Francese




Après la guerre, c’est la ruine.
Partis vainqueurs, on retrouve le pays
Chancelant, épuisé par le conflit.
C’est le monde des combines.
On vit dans la débine.
J’ai fait mille choses, dit le trouvère :
Comme laborantin d’usine,
Je notais des résultats imaginaires ;
Comme figurant pour le cinéma,
J’agitais un sabre de bois ;
Comme volontaire cobaye aéronautique,
J’expérimentais à destination cosmique.

Depuis lors, dit le trouvère, on m’ignore.
À présent, on m’ignore encore.
Ainsi, mort vivant, je suis le trouvère,
Le conteur d’histoires éphémères.
Pot de terre à l’écart du pot de fer,
Je vas, je viens, sans trop m’en faire.
Oublié, loin de la calomnie,
On vit comme on peut en Zinovie.
Ainsi, mes illusions perdues,
J’ai laissé mes prétentions littéraires,
J’ai brûlé mes tant adorés écrits de guerre,
Et je vis avec mes récits dans la rue.

Car pour être un grand écrivain important :
Il faut s’infiltrer dans les milieux littéraires,
Admirer les personnages influents,
Approuver hautement leurs commentaires.
Écrire des choses un peu ternes,
Des textes pas longs, mais d’actualité,
Des trucs qui cassent pas la lanterne,
Une histoire qu’ils peuvent accepter.
Pour être édité, ne rien bousculer,
À tout participer, partout se faufiler,
Garder sa place et finalement,
Après longtemps, écrire un gros roman.

Dans la rue, le soir, on s’attroupe ;
Pour les beuveries, on se regroupe
À l’heure de la parlote,
En un embrouillamini d’anecdotes,
Les blagues dans le pays par milliers,
Laissent doucement échapper,
Sans aucun aveu de paternité,
Les pensées secrètes des gens —
Traînées d’huile sur un océan,
Antidotes spontanés à la vérité
Par le Guide et les siens assénée,
Tout le temps inlassablement martelée.



Pagina principale CCG

Segnalate eventuali errori nei testi o nei commenti a antiwarsongs@gmail.com




hosted by inventati.org