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Les charniers

Eugène Guillevic
Lingua: Francese



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(Eugène Guillevic)


‎[1945]‎
Versi del poeta francese Eugène Guillevic (che qui si firmava con lo pseudonimo di “Serpières”), ‎cattolico praticante ma poi divenuto militante comunista grazie soprattutto all’amicizia con Paul ‎Éluard.‎
Questa poesia non faceva parte della raccolta intitolata “L’Honneur des poètes”, curata da Pierre ‎Seghers, Jean Lescure e da Paul Éluard, pubblicata clandestinamente nel 1943, ‎
ma nel 1965 fu inclusa nell’omonimo disco di letture poetiche accompagnate dalle musiche ‎originali del pianista e compositore francese Jean Wiener (1896-1982)‎

L’Honneur des poètes



Guillevic scrisse “Les charniers” nel 1945, dopo aver visto le foto di un’esecuzione di massa ‎perpetrata dai nazisti pubblicate su France-Soir. La poesia chiude anche la sua raccolta intitolata ‎‎“Exécutoire” pubblicata nel 1947‎


‎Charnier‎
Charnier
Passez entre les fleurs et regardez ‎
Au bout du pré c’est le charnier. ‎

Pas plus de cent, mais bien en tas, ‎
Ventre d’insecte un peu géant ‎
Avec des pieds à travers tout. ‎

Le sexe est dit par les souliers, ‎
Les regards ont coulé sans doute. ‎

‎—Eux aussi ‎
Préféraient des fleurs. ‎

À l’un des bords du charnier, ‎
Légèrement en l’air et hardie, ‎

Une jambe —de femme ‎
Bien sûr —‎

Une jambe jeune ‎
Avec un bas noir

Et une cuisse, ‎
Une vraie,‎

Jeune —et rien, ‎
Rien. ‎

Le linge n’est pas ‎
Ce qui pourrit le plus vite. ‎

On en voit par là, ‎
Durci de matières. ‎

Il donne apparence ‎
De chairs à cacher qui tiendraient encore. ‎

Combien ont su pourquoi, ‎
Combien sont morts sachant, ‎
Combien n’ont pas su quoi ? ‎

Ceux qui auront pleuré, ‎
Leurs yeux sont tout pareils, ‎
C’est des trous dans des os ‎
Ou c’est du plomb qui fond. ‎

Ils ont dit oui ‎
À la pourriture. ‎

Ils ont accepté, ‎
Ils nous ont quittés. ‎

Nous n’avons rien à voir ‎
Avec leur pourriture. ‎

On va, autant qu’on peut, ‎
Les séparer, ‎

Mettre chacun d’eux ‎
Dans un trou à lui, ‎

Parce qu’ensemble ‎
Ils font trop de silence contre le bruit. ‎

Si ce n’était pas impossible, ‎
Absolument, ‎

On dirait une femme ‎
Comblée par l’amour ‎
Et qui va dormir. ‎

Quand la bouche est ouverte ‎
Ou bien ce qui en reste, ‎

C’est qu’ils ont dû chanter, ‎
Qu’ils ont crié victoire, ‎

Ou c’est le maxillaire ‎
Qui leur tombait de peur. ‎

‎—Peut-être par hasard ‎
Et la terre est entrée.‎

Il y a des endroits où l’on ne sait plus ‎
Si c’est la terre glaise ou si c’est la chair. ‎

Et l’on est peureux que la terre, partout, ‎
Soit pareille et colle.‎

Encore s’ils devenaient aussitôt ‎
Des squelettes, ‎

Aussi nets et durs ‎
Que de vrais squelettes ‎

Et pas cette masse ‎
Avec la boue. ‎

Lequel de nous voudrait ‎
Se coucher parmi eux ‎

Une heure, une heure ou deux, ‎
Simplement pour l’hommage. ‎

Où est la plaie ‎
Qui fait réponse ? ‎

Où est la plaie ‎
Des corps vivants ? ‎

Où est la plaie —‎
Pour qu’on la voie, ‎

Qu’on la guérisse. ‎

Ici ‎
Ne repose pas,‎
‎ ‎
Ici ou là, jamais ‎
Ne reposera ‎

Ce qui reste, ‎
Ce qui restera ‎
De ces corps-là.‎

inviata da Bernart - 19/6/2013 - 10:07




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