D'habitude, moi, c'est moi
Mais curieusement, cette fois
Moi, c'est lui et lui, c'est moi.
Je dois dire les choses comme ça
Sinon, on ne comprendrait pas
Personnellement, je n'en reviens pas
D'avoir fait cette chose-là
Mais quelle pression pesait sur moi
Comme sur tout le monde dans cet État
Je m'en vais vous raconter ça
C'était en 72, il y a des années déjà
D'abord, il habitait Hanovre,
Il était instituteur et membre du syndicat
Il était de « gauche ». Je dois vous dire
Qu'il l'est toujours, il le croit
Avec ses remords de Judas
Sa grande honte, du jour où il est devenu renégat
Où il a vendu ses frères sans savoir pourquoi
Une fille a frappé à la porte chez moi
Elle m'a dit : Y a une fille, y a un gars
Il faudrait les planquer chez toi
Moi, j'ai accepté de faire ça
Maintenant, je pense qu'il ne fallait pas
L'hospitalité, c'est sacré. On ne trahit pas.
Enfin, on les a arrêtés chez moi
C'est vrai, c'est moi
J'ai appelé le 110, mais c'était pas pour ça
Pas pour ce million de marks de l’État
J'ai beau l'avoir donné ce million-là
Il me colle comme la poisse aux doigts
C'était en 72, il y a des années déjà
D'abord, il habitait Hanovre,
Il était instituteur et membre du syndicat
Il était de « gauche ». Je dois vous dire
Qu'il l'est toujours, il le croit
Avec ses remords de Judas
Sa grande honte, depuis ce jour-là
Où il a vendu ses frères sans savoir pourquoi
On les a mis en isolement, dans cette prison d’État
Seul en cellule, pas de bruit, des années, des mois
Pas de lumière, pas de paroles, rien, même pas de pas
Torture blanche, torture d’État
On a voulu en faire des renégats
Leur faire rendre leurs idées, abandonner leur combat
Ils résistaient – Ora e sempre : Resistenza !,
Grève de la faim pendant des mois
Comme tout ça ne marchait pas
Finalement, on les a suicidés à trois.
C'était en 72, il y a des années déjà
D'abord, il habitait Hanovre,
Il était instituteur et membre du syndicat
Il était de « gauche ». Je dois vous dire
Qu'il l'est toujours, il le croit
Avec ses remords de Judas
Sa grande honte, du jour où il est devenu renégat
Où il a vendu ses frères sans savoir pourquoi
Mais curieusement, cette fois
Moi, c'est lui et lui, c'est moi.
Je dois dire les choses comme ça
Sinon, on ne comprendrait pas
Personnellement, je n'en reviens pas
D'avoir fait cette chose-là
Mais quelle pression pesait sur moi
Comme sur tout le monde dans cet État
Je m'en vais vous raconter ça
C'était en 72, il y a des années déjà
D'abord, il habitait Hanovre,
Il était instituteur et membre du syndicat
Il était de « gauche ». Je dois vous dire
Qu'il l'est toujours, il le croit
Avec ses remords de Judas
Sa grande honte, du jour où il est devenu renégat
Où il a vendu ses frères sans savoir pourquoi
Une fille a frappé à la porte chez moi
Elle m'a dit : Y a une fille, y a un gars
Il faudrait les planquer chez toi
Moi, j'ai accepté de faire ça
Maintenant, je pense qu'il ne fallait pas
L'hospitalité, c'est sacré. On ne trahit pas.
Enfin, on les a arrêtés chez moi
C'est vrai, c'est moi
J'ai appelé le 110, mais c'était pas pour ça
Pas pour ce million de marks de l’État
J'ai beau l'avoir donné ce million-là
Il me colle comme la poisse aux doigts
C'était en 72, il y a des années déjà
D'abord, il habitait Hanovre,
Il était instituteur et membre du syndicat
Il était de « gauche ». Je dois vous dire
Qu'il l'est toujours, il le croit
Avec ses remords de Judas
Sa grande honte, depuis ce jour-là
Où il a vendu ses frères sans savoir pourquoi
On les a mis en isolement, dans cette prison d’État
Seul en cellule, pas de bruit, des années, des mois
Pas de lumière, pas de paroles, rien, même pas de pas
Torture blanche, torture d’État
On a voulu en faire des renégats
Leur faire rendre leurs idées, abandonner leur combat
Ils résistaient – Ora e sempre : Resistenza !,
Grève de la faim pendant des mois
Comme tout ça ne marchait pas
Finalement, on les a suicidés à trois.
C'était en 72, il y a des années déjà
D'abord, il habitait Hanovre,
Il était instituteur et membre du syndicat
Il était de « gauche ». Je dois vous dire
Qu'il l'est toujours, il le croit
Avec ses remords de Judas
Sa grande honte, du jour où il est devenu renégat
Où il a vendu ses frères sans savoir pourquoi
inviata da Marco Valdo M.I. - 13/6/2012 - 19:48
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Canzone française – Tortures et Suicides d’État – Marco Valdo M.I. – 2012
Histoires d'Allemagne 71
Au travers du kaléidoscope de Günter Grass. : « Mon Siècle » (Mein Jahrhundert, publié à Göttingen en 1999 – l'édition française au Seuil à Paris en 1999 également) et de ses traducteurs français : Claude Porcell et Bernard Lortholary.
On dirait un titre un peu comme le « Achtung Banditen ! », un titre qui annonce une atmosphère de terreur...
Mais c'est bien de cela qu'il s'agit. Dans l'Allemagne de ces années-là, et à la réflexion, dans toutes ces années que nous avons parcourues jusqu'à présent – depuis 1900, la terreur a toujours régné et pas n'importe quelle terreur, une terreur d’État et toujours dirigée contre les mêmes gens, toujours dirigées contre les pauvres et tous ceux qui ne se soumettaient pas à la Loi des Riches. Je ne parle pas simplement de la loi légale, celle qui transparaît au travers des lois, décrets, règlements en tous genres, mais bien de cette Loi invisible mais terrible, la loi des assis avec sa main invisible qui tue. C'est la loi implicite du monde, la loi des lois comme la Guerre de Cent Mille Ans est la guerre des guerres. La Fontaine en parlait déjà en disant : « La loi du plus fort est toujours la meilleure ». Et quand pour l'appliquer, les lois de l’État n'y suffisent pas, on passe outre et on ne s'en soucie pas... C'est ce qu'on couvre pudiquement du nom de raison d’État.
La chose, Marco Valdo M.I., mon ami, ne s'arrête pas là... Par exemple, quand les forces régulières n'y suffisent pas, l’État a recours à des services « spéciaux » ou fait appel à des milices « privées » et quand l’État ne s'y plie pas assez, des forces occultes entrent en jeu et s'arrangent pour changer l’État... En ce qui concerne l'Allemagne, il y eut les deux premiers Reichs qui ne faisaient pas dans la dentelle et qui en dernier ressort se lancèrent dans la guerre. Il y eut la République de Weimar où la terreur était d'usage courant ; ensuite, à nouveau un reich et une guerre et puis, il y eut la RFA, gardienne de ces traditions... Un pays où, par exemple, il ne fait pas bon d’être communiste...Un pays où es années-là, le patron des patrons (en fait le maître occulte) était un ancien SS de haut rang. C'est lui qui avait rançonné la Tchécoslovaquie pour le compte du Reich. Et derrière tout ça, toujours le même pouvoir occulte... les formes de l’État changent, le pouvoir reste... dans les mêmes mains. Souviens-toi du rêve d'Otto dans la chanson Holà, nous vivons !... On dit rêve, car c'est plus poétique... En termes réalistes, on ferait mieux de parler de projet d'Otto, qu'on appelle la « Grande Allemagne » et dont bien des signes actuellement montrent qu'il n'a pas été abandonné.
Bien au contraire, même s'il n'est pas explicite, c'est lui qui souterrainement conduit le bal européen. Et c'est précisément cette tendance, cette volonté de puissance camouflée que dénonçaient ceux qui menèrent le combat pendant des années et des années à partir des années 50-60 du siècle dernier... Un combat dans le prolongement de la résistance – d'où le « Ora e sempre : Resistenza ! » – résistance qui elle aussi parcourt toutes nos histoires d'Allemagne. Ainsi, on peut faire le parallèle entre le destin de Müsahm assassiné en prison, puis pendu – on parla de suicide Erich Mühsam, poète, anarchiste et assassiné et celui d'Andreas Baader, de Gudrun Ensslin, d'Ulrike Meinhoff et des autres suicidés des prisons de la RFA.
2 juin 1967 — Benno OHNESORG, étudiant, abattu par un policier à Berlin
11 avril 1968 — Attentat contre Rudi DUTSCHKE à Berlin,
15 juillet 1971 — Petra SCHELM, militante de la « R.A.F. » - Rote Armee Fraktion, abattue à Hambourg par la police.
4 décembre 1971 — Georg von RAUCH, militant de la « R.A.F. » - Rote Armee Fraktion est abattu à Berlin par la police politique.
2 mars 1972 — Thomas WEISBECKER, militant de la « R.A.F. » - Rote Armee Fraktion, est descendu à Augsbourg d'une balle en plein coeur tirée à trois mètres. Une froide exécution de deux agents de la police politique.
4 mai 1975 — Siegfried HAUSNER, membre du commando « Holger Meins », meurt dans la prison de Suttgart-Stammheim.
29 juin 1975 — Katharina HAMMERSCHMIDT, militante de la « R.A.F. » - Rote Armee Fraktion, ne pouvant être soignée en prison, est transportée dans un hôpital et y trouve la mort, faute d'y avoir été envoyée assez tôt.
8-9 mai 1976 — Assassinat déguisé en suicide de Ulrike MEINHOF dans la nuit du 8 au 9 mai à la prison de Stammheim. Les magistrats refusent de faire appel à un médecin refusent l'autopsie.
18 octobre 1977 – Liquidation des quatre derniers détenus de la prison de Stammheim : Andreas BAADER et Jan-Karl RASPE sont « suicidés » au revolver, Gudrun ENSSLIN est pendue. Irmgard MÜLLER, frappée au couteau, est dans un état grave.
12 novembre 1977 – Ingrid SCHUBERT, «suicidée» à la prison de Munich.
Pour faire un peu le point sur cette longue série d'assassinats politiques, on notera l'analyse d'un chroniqueur de cette époque : « Une partie de la gauche extraparlementaire — au regard de l'histoire et des conditions particulières de l’État ouest-allemand et de son type de société —, s'est décidée pour cette forme extrême du combat. Son opposition vient de la prise de conscience que les structures qui ont servi de base au national-socialisme et ont donné naissance à la Seconde Guerre mondiale, n'ont jamais été brisées en R.F.A. Le régime qui a succédé au IIIe Reich a uniquement changé de façade et de terminologie. Mais la propriété et les rapports de production sont restés inchangés. »
Mais, dis-moi, Marco Valdo M.I., mon ami, souvent tes chansons sont le fait d'un narrateur et abordent l'histoire de manière un peu indirecte. Qu'en est-il cette fois-ci ?
Maintenant, pour en venir à la chanson, elle est comme à l’ordinaire, tirée des récits de Günter Grass et en effet, il y a un narrateur. Mais un double narrateur, un narrateur qui raconte l'histoire comme s'il était le protagoniste et ensuite, se prend pour le protagoniste et passe à la première personne, au « Je ». En résumé, c'est l'histoire d'un Judas, d'un « indic », d'un dénonciateur qui a des remords et a même du mal à comprendre comment il en est arrivé là... Peut-être, Judas lui-même se posait aussi ces questions... Et que faire du million de D.M. de la « récompense »... Mais que pouvait-elle compenser cette « compensation » ? On sent bien que le dénonciateur a en fait agi dans une ambiance hystérique sous la pression énorme et constante que l’État, les médias et toute la machine de propagande opéraient – et opèrent encore – sur la société. Il n'y a qu'à voir ce qu'il en est actuellement. En fait, c'est encore un épisode de la Guerre de Cent Mille Ans que les riches font contre les pauvres, jour après jour, partout dans le monde... Comme on le sait, il s'agit d'assurer leur pouvoir, de préserver leur richesse et de permettre l'exploitation des gens par le travail.
Ainsi donc, nous qui n'avons pas le goût, ni sans doute la force, de mener la lutte comme l'ont fait ces jeunes gens d'Allemagne, il nous faut rependre notre tâche quotidienne et tisser le linceul de ce vieux monde ordinaire, suicideur, démocratiquement totalitaire, manipulateur et cacochyme (Heureusement!)
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane