Aux aurores et aux crépuscules,
Au milieu des bruits habituels de cet enfer
Les voix carcérales parviennent
Aux yeux clos des prisonniers.
Sans un souffle, les heures passent
Il ne reste qu'à attendre la peste,
Comme un escargot après la pluie,
Avec son corps noirâtre et sa coquille.
Confronté à des forces
Inconnues et gigantesques,
Hardi comme un prince de fable,
Après des temps infinis,
Le guerrier ressurgit,
Dans ce liquide plein d'herbes, de sangsues,
De crapauds et de venimeuses tortues.
Chargés d'arcs, de flèches, de sabres,
Avec le visage décidé de guerriers japonais
L'ennemi nous pousse dans les marais,
On avance comme des filles dans une rizière.
Réduits à une torpeur quasi-mortelle
On s'enfonce très lentement
Avec des mouvements de fœtus,
Dans cette mousse mousseuse moussue .
Nous respirons par des branchies.
On se tient là, debout dans la boue,
Avec notre sabre recourbé au poing,
Gardiens de cette plaine inondée à perte de vue,
Où il ne passe jamais personne.
On voit à travers l'eau et son mouvement
Un monde végétal, en proie au vent,
Et les formes d'un drapeau flottant;
Resté droit au milieu d'un tas de morts.
Des insectes fastidieux, des moustiques maléfiques,
Et de minuscules méduses à l'air tendre
Hantent cette eau archaïque.
Dans cette rizière labourée d'explosions.
L'eau stagne et il n'y a rien en dehors d'elle.
Immobile dans le trou,
Le corps inexorablement se dissout.
Du pas solennel du héron approche l'heure
De pourrir dans le chenal mort.
Au milieu des bruits habituels de cet enfer
Les voix carcérales parviennent
Aux yeux clos des prisonniers.
Sans un souffle, les heures passent
Il ne reste qu'à attendre la peste,
Comme un escargot après la pluie,
Avec son corps noirâtre et sa coquille.
Confronté à des forces
Inconnues et gigantesques,
Hardi comme un prince de fable,
Après des temps infinis,
Le guerrier ressurgit,
Dans ce liquide plein d'herbes, de sangsues,
De crapauds et de venimeuses tortues.
Chargés d'arcs, de flèches, de sabres,
Avec le visage décidé de guerriers japonais
L'ennemi nous pousse dans les marais,
On avance comme des filles dans une rizière.
Réduits à une torpeur quasi-mortelle
On s'enfonce très lentement
Avec des mouvements de fœtus,
Dans cette mousse mousseuse moussue .
Nous respirons par des branchies.
On se tient là, debout dans la boue,
Avec notre sabre recourbé au poing,
Gardiens de cette plaine inondée à perte de vue,
Où il ne passe jamais personne.
On voit à travers l'eau et son mouvement
Un monde végétal, en proie au vent,
Et les formes d'un drapeau flottant;
Resté droit au milieu d'un tas de morts.
Des insectes fastidieux, des moustiques maléfiques,
Et de minuscules méduses à l'air tendre
Hantent cette eau archaïque.
Dans cette rizière labourée d'explosions.
L'eau stagne et il n'y a rien en dehors d'elle.
Immobile dans le trou,
Le corps inexorablement se dissout.
Du pas solennel du héron approche l'heure
De pourrir dans le chenal mort.
inviata da Marco Valdo M.I. - 1/1/2010 - 22:56
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Canzone léviane – Du pas solennel du héron – Marco Valdo M.I. – 2009
Cycle du Cahier ligné – 74
Du pas solennel du héron est la septante-quatrième chanson du Cycle du Cahier ligné, constitué d'éléments tirés du Quaderno a Cancelli de Carlo Levi.
Cette fois, Lucien l'âne mon ami à l'âme d'or, je te l'accorde, le titre de la canzone sonne étrangement... mais juste. Toi qui as longé tant de fleuves, de rivières, de lacs, de côtes et depuis si longtemps... toi qui as connu le monde sans la pollution, toi qui as vu Xénophon (était-ce lui ?) attendre le passage des cadavres de ses ennemis à l'embouchure qui plonge dans l'Hellespont, non loin de Troie. Toi, l'âne aux yeux plus perçants que ceux de l'autour, tu as certainement déjà vu le héron déployant ses longues échasses et avançant comme détaché du monde commun au plein milieu d'un étang ou d'un marécage. Et donc ainsi, tu peux ressentir l'ambiance de cette canzone un peu vaseuse.
Oui, certainement que je connais le héron et son pas majestueux et son air un peu perdu, dit Lucien l'âne. Je vois très bien dans quelle fange il pose ses pieds en éventail... Je ne l'y suivrais pas volontiers...
Cette canzone, dont je te rappelle qu'on ne sait trop qui – le guerrier, le prisonnier, le blessé, l'incarcéré, l'enfermé – la pense ou la rêve, ni où, ni quand... est celle du retour du guerrier et le rêve tourne au cauchemar – comme dans toutes les guerres où l'on s'en va la fleur au fusil finir on ne sait trop où, ni comment. Un cauchemar putride où il voit littéralement la mort avancer du pas solennel du héron. Tel est, dit la canzone, le destin du guerrier...
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane