Langue   

Les Esclaves et les Soldats

Marco Valdo M.I.
Langue: français




Le Veilleur est revenu ce matin.
Il dit : Chez nous, il y a des esclaves,
Des gens venus de pays lointains.
On les cache, on en use sans entrave
Par milliers à mille travaux rebutants ;
On les fait bosser vingt heures de rang.
La nuit, ils dorment sur les chantiers,
Ou quelque part au fond des ateliers.
Jamais, on ne les voit en ville ;
Jamais, ils ne voient de civils.
Les survivants seront bienheureux.
Un jour, on les renverra chez eux.

On n’en finira jamais avec elle,
Dit un soldat de passage.
Chaque jour, de pires nouvelles
Gâchent la vie et le paysage.
L’autre soir, en rentrant du front,
Je bombais le torse, je levais le front.
Je me disais : je suis sauvé ;
Cette fois, j’ai assez donné.
Cent drapeaux, j’avais plantés.
Je devais être récompensé.
Un boulot, une chambre, un congé.
J’ai reçu : une médaille, un papier.

C’est moche, mais pas désespéré.
Je pourrai toujours m’en tirer.
Ce matin, ils m’ont convoqué ;
Sans rire, ils m’ont expliqué :
On manque de soldats là-bas.
À la guerre, ils me renvoient.
À la guerre, on est tous condamnés ;
Des vieilles gens aux nouveaux-nés,
La guerre nous ronge de mois en mois,
Mais je suis devenu plus sage,
Je ne veux plus de la guerre en moi.
Je vais partir en voyage.

Alors, Zorba le chat demande :
Horreur sans fin et tout ça, pour quoi ?
Pour un matamore, un qui commande,
Qui de vos morts, entretient son moi.
D’expérience certaine, foi de Zorba,
Tous les Guides sont comme ça.
Ils mesurent leur grandeur et leur sacre
À l’ampleur historique des massacres.
Ils vivent leur Grande Guerre en couleurs,
Ils glorifient vos morts et vos malheurs.
« Jamais plus ! », les vieux s’étaient promis,
Mais encore, l’Ogre a grand appétit.



Page principale CCG

indiquer les éventuelles erreurs dans les textes ou dans les commentaires antiwarsongs@gmail.com




hosted by inventati.org