Lingua   

Dreyfus

Yves Duteil
Lingua: Francese


Yves Duteil


Je suis un peu ton fils
Et je retrouve en moi
Ta foi dans la justice
Et ta force au combat

Dans ton honneur déchu
Malgré ta peine immense
Tu n'as jamais perdu
Ton amour pour la France

Et s'il ne reste qu'un murmure
Pour te défendre
Par-delà tous les murs
Il faut l'entendre

Je suis un peu ce frère
Qui remue les montagnes
Lorsque tu désespères
Dans ton île en Guyane

Et je souffre avec toi
Des fers que l'on t'a mis
Pour écraser ton âme
Et pour briser ta vie

Mais pourquoi fallait-il
Pour t'envoyer au Diable
Te prendre dans les fils
De ce piège effroyable?

J'ai vu souvent mon père
S'assombrir tout à coup
Quand j'évoquais "L'Affaire”
Comme on disait chez nous

Et j'ai vécu longtemps
Sans rompre ce silence
Comme un secret pesant
Parfois sur la conscience

J'imaginais comment
Des hommes étaient capables
D'arrêter l'innocent
Pour en faire un coupable

Il était Alsacien,
Français, juif, capitaine,
Vivant parmi les siens
À Paris dix-septième

Quand un matin d'octobre
On l'accuse, on l'emmène
Vers douze ans de méprise
Et d'opprobre et de haine

Traité plus bas qu'un chien,
Laissé dans l'ignorance
De tous ceux qui sans fin
Luttaient pour sa défense

Courageux, opiniâtres,
Jouant parfois leur vie
Sur un coup de théâtre
En s'exposant pour lui

Je suis un peu son fils
Et c'est moi que l'on traîne
Au Palais d'injustice
En l'écoutant à peine

Et quand Paris s'enflamme
Alors qu'on l'injurie,
Le coupable pavane
À quatre pas d'ici...

Lucie...
Mon corps est à genoux
Mais mon âme est debout
Un jour je reviendrai
Vers la terre de France
Crier mon innocence
Et retrouver la paix

Ici...
Je n'ai plus rien de toi
Et j'ai peur quelquefois
Que ma raison s'égare
Si je perds la mémoire
Si j'oublie qui je suis
Qui pourra dire alors
À ceux qui m'aiment encore
Que je n'ai pas trahi
Que j'ai toujours porté
L'amour de mon pays
Bien plus haut que ma vie
Bien plus haut que la vie...

C'était il y a cent ans
Dreyfus est mort depuis
Mais je porte en chantant
Tout l'espoir de sa vie

Pour la mémoire des jours
Puisqu'en son paradis
On sait depuis toujours
Qu'il n'a jamais trahi

Il n'a jamais trahi
Son coeur, ni son pays.‎



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