IndochineNé en pleine vague new wave des années 1978-1982, le groupe français Indochine est longtemps resté en tête des hit-parades, entre le défunt Téléphone et le naissant Noir Désir. Avec des textes simples et efficaces et une musique dansante et "électronisante", les quatre garçons d'Indochine furent le porte-parole d'une jeunesse française en manque d'idoles.

Après une traversée du désert, ils reviennent en force en 2002 avec Paradize, un album de grande qualité.

Agés de vingt ans à peine en cette année 1981, deux amis se lancent dans l'aventure musicale. Cette période charnière durant laquelle se côtoient le punk, le rock, le reggae ou la new wave est propice aux formations les plus audacieuses.

Nicola Sirkis et Dominique Nicolas en sont conscients et comptent bien jouer le jeu en fondant leur premier groupe Les Espions. Rapidement rejoints par Stéphane Sirkis (le frère de Nicola) et Dimitri Bodianski, le groupe, renommé Indochine, donne son premier concert le 29 septembre de la même année, au Rose Bonbon, célèbre discothèque parisienne.

Avec quelques morceaux efficaces, Indochine séduit d'entrée un public jeune et signe contre toute attente son premier contrat. Dizzidenze Politik sort quelques semaines plus tard, en février 1982, dans les bacs des disquaires et les musiciens entament une tournée en première partie du déjà célèbre Taxi Girl. Ces derniers ignorent le risque qu'ils prennent en engageant "Indo" sur leur tournée: rapidement, l'élève dépasse le maître et les concerts voient surtout triompher les apprentis musiciens.

L'aventurier

Le succès hexagonal d'Indochine passe alors par la sortie d'un premier 33 tours fin 1982 intitulé L'aventurier. En quelques mois, le phénomène est lancé: toute une génération fredonne l'air de "Bob Morane contre tout chacal, l'aventurier contre tout guerrier...".

Public et critiques sont unanimes. Ils voient débarquer là une nouvelle lignée d'artistes, directement influencés par les Depeche Mode ou autres Cure britanniques. Les quatre amis reçoivent d'ailleurs en 1983 le Bus d'Acier, qui récompense la meilleure formation musicale de l'année.

S'en suit un second album Le péril jaune et une tournée internationale qui resserrent les liens entre le groupe et un public passionné.

Mais c'est surtout l'album 3 qui fait d'Indochine le groupe le plus en vue des années 80: 3ème sexe, Canary Bay, Tes yeux noirs (dont le clip est réalisé par Serge Gainsbourg), Salômbo, Trois nuits par semaine sont autant de tubes qui profitent de la brèche laissée par la séparation de Téléphone pour imposer les quatre d'Indo au sommet des hit-parades. L'album comptabilise à ce jour près d'un million de copies vendues et reste LA référence des indo-maniaques !

Un lent déclin

Malgré le succès de 7000 danses, leur quatrième album, et une seconde vie en Amérique du Sud où le groupe devient un phénomène, Indochine subit une lente érosion de sa notoriété. Plusieurs éléments vont entraîner, en quelques années, une traversée du désert.

Tout d'abord l'arrivée sur la scène rock française d'une nouvelle génération d'artistes, représentés par les Noir Désir, Mano Negra ou autre Rita Mitsouko. Naturellement, une partie non négligeable du public "indochinois" vieillissant se tourne vers ces nouveaux courants plus contemporains. La verve et la plume d'un Bertrand Cantat ou d'un Manu Chao y sont pour beaucoup dans ce "retournement de veste", ainsi que le déclin de la musique pop ou new wave dans toute l'Europe.

Mais avant tout, les années et la fatigue ont eu raison de l'amitié liant les quatre compères. Avec le départ de Dimitri en 1989, première remise en cause.

Si les albums se vendent de moins en moins (Un jour dans notre vie en 1993 passe inaperçu), les concerts sont là pour rappeler au public la formidable capacité du groupe à déchaîner toute son énergie sur scène. 1995: deuxième avertissement. Dominique quitte le groupe, laissant les deux frères Sirkis présider à l'avenir d'Indochine.

Un virage anglo-saxon

Le nouvel Indochine se tourne résolument vers ses modèles britanniques. Wax abandonne les couleurs exotiques habituelles pour épouser le son pop anglo-saxon. Mais en plein enregistrement du nouvel album Dancetaria en février 1999, Stéphane Sirkis décède d'une hépatite foudroyante.

Bouleversé, Nicola décide cependant de continuer l'aventure, seul survivant de la formation initiale, s'accompagnant de divers musiciens. Le public lui en est reconnaissant et vient nombreux rendre hommage à Stéphane durant la tournée Dancetaria qui culmine le 24 juin 1999 à l'Olympia.

Les expériences qu'a subies le groupe le rend plus populaire. La mort de Stéphane sonne paradoxalement la renaissance d'Indochine. Après une tournée triomphale, et un album live Nuits intimes, le nouvel album studio, Paradize, sort en mars 2002. La presse est unanime pour souligner la grande qualité musicale et artistique de cet opus, vendu en quelques mois à plus de 300.000 exemplaires.

Désormais seul aux commandes d'Indochine, Nicola Sirkis fait renaître le groupe de ses cendres et se taille la part du lion dans le paysage musical francophone de ce nouveau millénaire. Un retour inattendu pour une formation de plus de vingt ans qui reste, souvent à tort, associée à une musique adolescente et simpliste. Un groupe qu'il faut absolument (re)découvrir.

Sébastien Brumont

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